Les membres du groupe francilien de Black Metal Houle ont pris le temps de répondre à mes questions concernant la sortie de leur premier EP éponyme.
Bonjour et tout d’abord merci de m’accorder de votre temps ! Comment présenterais-tu le groupe Houle sans utiliser les habituelles étiquettes “Metal” ?
Houle : Merci de nous donner un peu de ton temps pour présenter Houle. Nous sommes un groupe qui puise son inspiration dans ce que l’océan suscite comme peur et admiration chez l’Homme. Notre musique se veut comme une invitation au voyage vers des eaux glacées et tumultueuses. Nous aimons y voir un côté odysséen où l’Homme doit faire face à des forces qui peuvent le surpasser, mais qui choisissent parfois de le laisser en paix pour contempler la beauté de l’Océan. Sans mettre d’étiquette donc, c’est une musique qui se veut immersive afin de faire ressentir de nombreuses émotions à celui qui choisit de l’écouter: l’angoisse, la peur, la rage, la quiétude ou encore l’apaisement…
D’où vient le nom du groupe, et comment le reliez-vous à la musique que vous jouez ?
Houle : Le nom du groupe a germé longtemps dans la tête de Crabe qui a grandi entouré par la mer. À Paris, il a cherché à rassembler des musiciens autour de ce nom pour créer le concept qu’est Houle aujourd’hui. Pour nous il correspond particulièrement bien à notre musique, une houle est par définition un mouvement de la mer créé par un vent lointain. Nous voulions une musique qui puisse être tantôt paisible tantôt virulante et jouer autour de cette ambivalence. Le thème marin est aussi omniprésent, le voyage à travers les continents, les mythes odysséens, les marins partis en mer et leurs familles restées à terre. Nous avions à cœur de conter une mer loin du récit lovecraftien habituel et nous recentrer sur les hommes et la nature comme force toute puissante.
Votre premier EP, Houle, s’apprête à sortir, comment vous sentez-vous à ce sujet ?
Houle : Notre premier EP est récemment sorti, au début du projet nous ne nous attendions pas à avoir un tel engouement autour de notre musique. Nous sommes tous des nouveaux venus sur la scène, et nous voulions jouer avec les codes et les musiques nous plaisant. Nous sommes très heureux que la recette surprenne et plaise à la plupart. Nous avons fait des choix qu’on pourrait trouver clivant, notamment sur le visuel et la scénographie. Et pour un premier essai nous sommes extrêmement fier.e.s du résultat.
Comment s’est passé le processus de composition ? Ainsi que l’écriture des paroles ?
Houle : Cet album s’est construit au fur et à mesure de l’arrivée des différents membres, il a donc connu beaucoup d’évolutions en fonction des influences de chacun. Pour le moment Crabe a présenté les squelettes des morceaux qu’il a fallu arranger et étoffer, chacun y apportant la musicalité de son instrument et la particularité de ses propres capacités techniques. Pour le prochain album, nous avons appris à travailler avec beaucoup plus de cohésion en amont. Les squelettes sont maintenant travaillés en duo avec Grey Gaast et Crabe, et le groupe entier a une vision préalable de ce qui est en train de se construire. Il en est de même pour les paroles, le projet a mis du temps à trouver une personne pour occuper le poste du chant. Quand Adsagsona est arrivée, Le Continent, Au Loin La Tempête et Sous l’Astre Noir avaient déjà étés écrite par Vikser et Crabe. Elle n’a eu qu’un travail de sonorité et d’interprétation pour ces musiques. Elle a cependant eu carte blanche sur les paroles et les parties de chant de La Dernière Traversée, laissant apparaître un morceau beaucoup plus torturé que les autres.
Qu’est ce que tu peux me dire concernant la création de l’artwork, qui me fait énormément penser à une gravure ? Comment s’est passée la collaboration avec l’artiste ?
Houle : Laure Jeandet a réalisé la pochette, une artiste et une très bonne amie à nous. L’œuvre est bel est bien une linogravure, une technique où un morceau de cuir est gravé permettant de créer un tampon. Ce qui donne ces imperfections et cette granularité dans le résultat final. Lors de la commande de la pochette, nous étions inspirés par les grandes fresques odyséennes grecques, et nous voulions quelque chose qui transparaisse dans ce style. Cette technique a permis de faire de nouvelles impressions du tampon, nous en avons tiré 15 qui seront bientôt disponibles sur notre Bandcamp !
On note une grande diversité dans les morceaux, en particulier sur La Dernière Traversée qui mélange une saturation axée Post-Black avec un final très doux et des influences presque Prog, comment arrivez-vous à conserver un équilibre dans vos compositions ?
Houle : Dans les premiers temps, le groupe se donnait un axe plus Atmosphérique/Post-Black. Ce qui a énormément changé au fur et à mesure de la maturation du projet. Actuellement nous tendons plus vers l’incorporation de passages Mélodique/Atmosphérique, le but est que chaque partie soit complémentaire et fasse évoluer le morceau dans le voyage qu’il propose. J’imagine que La Dernière Traversée est l’exemple parfait de cette volonté d’immerger le public dans un environnement, de l’emmener avec lui sur une barque solitaire en proie à l’abandon.
Côté vocal, je note également un contraste entre des hurlements intenses, quelques rares parties de chant clair, et des variations très intéressantes. Comment s’est fait le travail sur les placements de voix ?
Houle : Adsagsona qui assure les parties de chant est arrivée assez tardivement dans le processus de création de l’EP. Les parties de chant avait déjà été en partie imaginées par Crabe et Vikser (ormi La Dernière Traversée qu’elle a intégralement remanié), elle s’est donc beaucoup attelée à jouer avec différents timbres dans le but de donner les différentes profondeurs que nécessitait les morceaux. Une étape a été extrêmement importante dans le processus vocal, lors de l’enregistrement de l’album Adsagsona a été coachée par Jessy Vignolles (Exist in Ruin, Syndro-syS, NzgL). Elle nous a vraiment aidé à avoir un oeil extérieur de chanteuse confirmée sur la scène et à emmener au maximum des capacités vocales.
Vous avez récemment signé chez Les Acteurs De L’Ombre Productions, comment vous ont-ils convaincu et accompagné pour la sortie de l’album ?
Houle : A vrai dire ils n’ont pas vraiment eu besoin de nous convaincre, nous avons directement accepté quand on a su qu’ils voulaient entamer une collaboration avec nous. Leur aide a été extrêmement précieuse, dans un premier temps ils nous ont énormément aidé à développer notre imagerie et notre scénographie. Ils nous ont donné des contacts pour faire évoluer notre logo, se sont servis de leur réseau pour développer notre communication et nous ont proposé de jouer en première partie de Grima à Paris et à Nantes. Sans eux l’album n’aurait clairement pas autant eu d’impact et aurait certainement fait moins … de vague !
Le groupe s’est créé en 2021, en plein pendant la pandémie. Est-ce que cette période a joué d’une quelconque manière sur le groupe ?
Houle : Pour Grey Gaast, Vikser et Adsagsona cette période a été comme beaucoup l’occasion de se replonger dans la musique. Sans ces confinements ils n’auraient certainement pas cherché à rejoindre un projet musical et Houle ne serait pas ce qu’il est aujourd’hui. Crabe et Zéphyr travaillaient déjà sur le projet, mais ils cherchaient à le développer: on peut donc dire que la pandémie a permis à Houle de se trouver.
Est-ce que vous avez déjà des plans pour le futur du groupe ? Que ce soit pour des dates live, ou même autre chose ?
Houle : Un album est en préparation, nous cherchons à l’enregistrer pour la fin d’année 2023. Deux dates sont également annoncées en première partie de Grima à Paris et à Nantes le 6 et 8 janvier. Nous avons notre agenda ouvert, si jamais on cherche à nous booker nous étudierons la date avec beaucoup d’intérêt. Nous prévoyons également d’étoffer notre scénographie, ceux qui nous ont vu sur nos trois dernières dates à Paris pourront témoigner du fait que nous donnons une importance toute particulière à étoffer notre show d’une date à la suivante !
Mon premier contact avec Houle a été votre date au Klub avec Groza, et j’avais déjà relevé une identité visuelle (marinières, traces noires sur le visage…) travaillée. Est-ce que vous avez également des projets pour accentuer encore plus ce côté là ? Quel serait votre but ultime à ce niveau ?
Houle : Merci pour la review que tu avais sortie suite à ce concert. La date avec Groza a été la première que nous avons faite avec cette identité visuelle-ci, mais comme nous avons été appelés pour un remplacement 5 jours avant le concert, tout n’était malheureusement pas encore totalement au point à ce moment-là. Nous avons la volonté de proposer des concerts toujours plus immersifs pour le public. Nous avions la chance d’avoir un thème qui nous permet de faire énormément de choses d’un point de vue scénographique. Dans ce sens, nous travaillons actuellement avec un ingénieur lumière pour développer un aspect beaucoup plus immersif sur nos dates. Nous avons aussi pu chiner par-ci par-là quelques éléments de décor, il nous reste donc beaucoup de bricolage pour rendre le tout cohérent avec notre univers.
Quel est votre regard sur la scène française actuelle ? Quels sont les groupes de la scène française qu’il faut absolument écouter en 2022 selon vous ?
Houle : C’est une question bien subjective ! Il y a certains artistes qui nous touchent différemment au sein du groupe. Véhémence fait l’unanimité chez nous, même si le groupe n’en est pas à ses débuts. Quel dommage de ne pas pouvoir en profiter en concert ! Sinon, l’album de Silhouette est très beau, et ils sont un projet encore très jeune ! Félicitations à eux !
Est-ce qu’il y a des groupes ou des musiciens avec lesquels vous aimeriez collaborer, que ce soit pour un titre ou plus ?
Houle : Pour l’instant, il est un peu tôt pour nous pour réfléchir à d’éventuelles collaborations musicales. Nous souhaitons déjà réussir notre prochain album, et c’est déjà un travail compliqué que d’être satisfait de notre identité musicale propre ! Dans Houle, nous mettons aussi un point d’honneur au fait de pouvoir reproduire sur scène ce que nous proposons en studio. Donc une collaboration irait à l’encontre de ce principe, mais peut-être qu’à l’avenir, avec un peu plus de maturité viendra le temps de réfléchir à travailler avec d’autres artistes ?
Je suppose que comme beaucoup de groupes, jeunes ou moins jeunes, vous ne pouvez pas vivre de votre musique, mais quels sont vos métiers et hobbies ?
Houle : Dans le groupe Grey Gaast vient à peine de finir ses études en systèmes embarqués, Zéphyr est ingénieur informatique, Vikser ingénieur nucléaire, Crabe data analyst et Adsa acousticienne. On peut dire que la musique est notre principale passion à tous, mais on a également de gros amateurs de science fiction, de linguistique, de dépression, d’insomnie et de houblon !
Est-ce qu’il y a un artiste avec lequel vous souhaiteriez collaborer ? Que ce soit pour un titre, un album, un artwork…
Houle : Musicalement, pas encore donc, comme expliqué un peu au dessus ! Pour ce qui est du visuel, je pense qu’il y en aurait bien comme Adam Burke qu’on ne présente plus… Son travail sur des albums comme Aurora Borealis d’Aureole est magnifique selon nous. Cependant nous n’avons pas encore réfléchi à notre prochain artwork pour le futur album. Nous serons plus à même de savoir de qui nous rapprocher lorsque nous aurons décidé d’une direction artistique à prendre pour l’album !
Si je vous demandais à quel plat français pourriez-vous comparer la musique de Houle, lequel choisiriez-vous ? Pourquoi ?
Houle : Les moules frites s’imposent. C’est marin, c’est meilleur chaud, il faut pas d’expérience pour en faire mais quand c’est bien cuisiné c’est un délice !
Dernière question: avec quels groupes rêveriez-vous de tourner ? Je vous laisse créer une tournée avec trois groupes, plus Houle en ouverture.
Houle : Houle – Moonlight Sorcery (s’ils souhaitent faire du live, leur premier album est incroyable) – Forteresse – Immortal.
Merci à nouveau de votre disponibilité, je vous laisse les mots de la fin !
Houle : Merci à toi pour ton temps, ta patience et ton soutien envers le groupe !