Review 1896 : Nature Morte – Oddity

Nature Morte est plus vivant que jamais.

Depuis leur première démo en 2016, le trio composé de Chris Richard (basse/chant), Stevan Vasiljevi? (guitare) et Vincent Bemer (batterie) n’a cessé de composer. En 2023, ils signent avec Frozen Records pour la sortie d’Oddity, leur troisième album.

Bruises & Lace, le premier titre, nous plonge immédiatement dans ce mélange dissonant et relativement mélancolique avant d’accueillir les premiers hurlements viscéraux. Le contraste est aussi saisissant que planant, mais même lorsque l’accélération invoquera les sonorités les plus brutes, le groupe conserve une touche de quiétude, confirmée par les passages les plus calmes tout comme sur The Pier où les mélodies aériennes rencontrent une base rythmique lancinante qui ne demande qu’à s’enflammer, guidées par les parties vocales. Le break central se transforme en complainte pesante et mystérieuse habitée par quelques grognements, mais la saturation refera surface pour nous mener à Here Comes The Rain, où le groupe accueille Cindy Sanchez (Lisieux) pour donner une touche de douceur, à peine entachée par le chant rauque du vocaliste. Bien qu’étrange, la balade s’intègre parfaitement à l’approche brumeuse avant que New Dawn ne vienne faire renaître les sonorités sombres et inquiétantes, complétées par quelques murmures puis par les cris étouffés pendant que les mélodies majestueuses grandissent. Le son meurt doucement, mais il sera ramené à la vie à pleine vitesse par Monday Is Fry Day et son blast vif, qui donne à la composition une identité plus agressive. Le break viendra apaiser l’atmosphère, mais il ne durera pas, et il laissera le groupe se déchaîner à nouveau sous les harmoniques lancinantes avant un final étrange, suivi par l’accrocheuse Banquet Overflow For The Mind House, qui proposera des tonalités presques joyeuses avant de laisser les éléments plus sombres appesantir l’atmosphère. Le break, pourtant très doux, devient inquiétant avant d’exploser à nouveau avant ce final qui nous autorise un court moment de répit, suivi par Nothingness où le groupe fait appel à Lionel Forest (Cloudy Skies) pour cette courte et apaisante composition où les influences Gothiques contribuent à cette quiétude aérienne avant qu’Untitled ne nous offre un moment bruitiste étrange et inquiétant. Le groupe referme l’album avec une reprise très sombre de Fireal, composition créée par la légende américaine du Metal Alternatif Deftones, que la patte saturée du groupe viendra parfois alourdir ou rythmer avant de laisser les sons apaisants revenir.

Nature Morte intègre toujours plus d’influences à ses vagues de saturations sombres et pesantes, créant un mélange unique qui fait d’Oddity un album exploite bien plus que ses racines Blackgaze étouffantes.

95/100

English version?

Quelques questions au groupe Nature Morte, à l’occasion de leur concert au Hellfest 2023.

C’est parti ! Bonjour et merci de m’accorder votre temps. Comment vous vous sentez ?
Stevan Vasiljevi? (guitare) : Bien.
Vincent Bemer (batterie) : Mais pas des pieds.
Stevan : …Mais pas des pieds. Fatigués, contents, soulagés.

Soulagés carrément ? Il y avait de la pression ?
Stevan : Ouais.

Enfin bon nan il est en train de la boire la pression *rires gras*
Vincent : Oh ça va me plaire ça !
Stevan : Ah t’aime bien les punchlines toi aussi, ça peut durer longtemps.

Ouais mais quand c’est trop long c’est pas bon. Alors, vous avez ouvert le festival sur la Temple ce matin, comment ça c’est passé pour vous le show, aussi bien que le front que le back, face à la foule et derrière ?
Stevan : Bien, bien bien, on était content de voir plein de monde dès 10h30 donc c’était top. 

Il y avait du monde, pas assez à mon goût…
Stevan : Nan, il y avait du monde, c’était bien. Et back qu’est ce que t’entends par back ?

L’administratif et tout, c’était pas compliqué de venir, et tout ça ?
Stevan : Mais on est super bien reçu ici, c’est mortel, enfin le staff et tout on est reçu comme des princes au Hellfest.

Les bières sont fraîches !
Stevan : Et les bières sont fraîches. 

Elles moussent pas trop ?
Stevan : Non. 

Qu’est ce que ça signifie pour vous de jouer au Hellfest ?
Vincent au fond : D’la merde !

Ah bah OK je me casse ! *rire*
Stevan : Naaaan, c’est cool. En tant que musicien de groupe de Metal, jouer au Hellfest c’est quand même pas mal je crois.

C’est un peu un rêve ?
Stevan : On est assez privilégié c’est vrai
Vincent : Sachant que je suis le seul festivalier de base. Parce que eux n’avaient jamais été…
Stevan : C’est la première fois qu’on y fout les pieds
Vincent : C’est-à-dire que eux ils arrivent ils sont artistes. Moi j’étais festivaliers donc j’ai joué sur une scène.

Et tu les fréquentes ces gens là ?
Vincent : Non je les aime pas. On fait de la musique ensemble c’est complètement différent. *rires* C’est un peu compliqué d’avoir un pass maintenant, donc pour le coup j’avais l’opportunité d’arriver à en avoir pendant quelques années, eux pas. 

T’as préparé le terrain ?
Vincent : Même pas. Je leur ai dit, vous vous démerdez, vous allez arriver et on va voir comment ça se passe… Non, je pense qu’on l’a pas vécu de la même manière par rapport…
Stevan : Oui, c’est vrai. Elle t’a bien cerné.
Vincent : Putain vas-y je ferme ma gueule alors.

Oooh tu veux un bisou ?
Vincent : Non j’aime pas ça. 

Ok. Comment vous êtes-vous préparés pour ce show ? Mentalement, physiquement, répétitions… ?
Stevan : Ouais, répétitions, normal. Mais après on a joué une demi heure donc on a dû écourter notre set habituel donc…

Comme je dis vous n’êtes pas un groupe de doom donc vous avez pu faire plus d’une chanson c’est déjà bien.
Stevan : C’est ça. On a fait quatre en une demi-heure donc ça va….Donc voilà on s’est préparé comme ça ! Répétitions, tapis de course, vélo d’appartement… *rire* 

Comment est ce que vous pourriez décrire le son de Nature Morte sans utiliser les étiquettes habituelles de type “Black/Atmo/etc”… Pour des novices quoi.
Stevan : Ahhhhhh….*silence* Metal indépendant.

Ouais il y a de l’effort.
Vincent : C’est comme de l’indie rock avec de la saturation et un mec qui gueule.
Stevan : C’est un mélange de douleur, de finesse et de violence … et de puissance.

On est en plein dans le BDSM quoi.
Vincent : *très heureux* Mais un peu ! Mais ouais !!
Stevan : Oui mais non.
Vincent : Moi j’aime bien ce “Metal indépendant”. 

Votre dernier album, Messe Basse, vient de fêter ses deux ans cette année, vous avez fait pas mal de show pour le promouvoir, comment c’est passé l’épreuve du live ?
Stevan : On a fait deux tournées. Une européenne, Europe de l’Est et une Italie, Suisse et tout, et des concerts un peu one shot, on a fait le Motocultor l’année dernière, le Hellfest aujourd’hui donc voilà, on est toujours un peu dans la défense de cet album, là en attendant le prochain album et puis on a le Rock in Bourlon.

Ah , le prochain festival ? Bon courage ! Au début du mois vous avez dévoilé Oddity, avec une reprise de Deftones, Firewall. Pour commencer, comment s’est passée la composition de l’album et quelles ont été les différences avec la création de l’album précédent ?
Stevan  : Le process de composition a été identique….
Vincent : C’est lui qui fait tout.
Stevan : Je fais tout et puis eux ils m’écoutent. *rires*

C’est les inspecteurs des travaux finis ?
Stevan : Voilà ! *rires* Le petit personnel quoi.
Vincent : Il amène les morceaux quasi tout fait, nous on fait des petits arrangements par-ci par-là, Chris il amène les textes ensuite dessus, mais je veux dire l’essentiel de l’instru et faite par le guitariste par Stevan
Chris Richard (basse/chant) : C’est quoi les textes et les paroles ?
Vincent : …j’m’en branle. 

Les textes c’est quand c’est écrit, les paroles c’est quand tu chantes.
Stevan : Voilà !
Chris : On fait comme ça depuis toujours, c’est Stevan qui pose l’essentiel du truc et nous si jamais on a des choses à redire on les redit, mais généralement on a rien à redire, on est content de ce qu’il apporte ! ça se passe très simplement
Vincent : Ouais, savoir qu’il y a rien à reprocher c’est un peu chiant quand même, on arrive à un moment où il sait exactement ce qu’il doit nous proposer…

C’est plutôt bien, au moins…
Vincent : CHAIS PAS, j’en sais rien, moi de base je l’aime pas, tu vois c’est…

Ah t’es bien forcé toi … jamais content !
Chris : Bah voilà ! Bah voilà !
Vincent : T’as vu mon reuf j’m’en bats les couilles frère *rire*… Oh je m’auto saoule en faisant ce genre de …
Stevan : Ouais.

Juste une petite question perso comme ça, comment vous faites pour avoir autant d’énergie, vous avez ouvert ce matin, là vous êtes à fond…
Stevan : Ah mais on est éclaté ! On est super crevé ! Et plus on est crevé plus on raconte des conneries !
Vincent : C’est vrai. *rires*
Chris : Nan mais c’est vrai pour l’énergie, plus on est fatigué, c’est comme en fin de tournée : les fins de tournées on est supers énergiques genre le File7, on revenait de 15 jours de tournée et euh on y va quoi ! 

Vous êtes géniaux. Qu’est ce qui vous a poussé à reprendre un titre de Deftones parce que c’est pas usuel on va dire quand même.
Stevan : C’est un groupe qu’on aime bien déjà, c’est pas les goûts de chacun, c’est pas forcément un groupe qu’on écoute toujours à l’heure actuelle mais c’est un groupe qu’on a écouté quand on a commencé la musique ado.

Quand vous étiez jeunes ?
Stevan : Quand on était jeune, exactement
Vincent : On l’est toujours !
Stevan : Et  ce titre particulièrement parce que c’est un morceau un peu particulier de Deftones, évolutif, progressif, donc ça correspondait bien avec ce qu’on propose nous habituellement dans nos compositions donc on s’est dit : allez on y va.

Un titre assez intriguant The Pier, où se trouve des parties vocales très mystérieuses sur le break central, comment ça a été créé et quelles sont-elles ? Quelles sont vos raisons ?
Chris  : Les sortes de chants tibétains là, tu parles de ça ? Ouais…
Vincent : Bah vas-y, répond ! *rire*
Chris : Alors comment ça a été créé ? Alors je vais te le dire… je vais vous le dire ma bonne dame !
Vincent : Vas-y Chris !
Chris : Effectivement on a essayé d’avoir une approche une peu différente de ce qu’on fait habituellement, tout en étant pas non plus complètement, enfin je sais pas chanter et je chanterai jamais, mais c’était des références musicales et sur le fait qu’on sentait pas forcément des cris ou des trucs comme ça sur tel ou tel passage, on était pas … on a essayé de changer, de faire des trucs différents, je leur ai fait des propositions, Vincent n’était pas là pour le coup donc il l’a découvert sur le tard
Vincent : J’ai pas eu mon mot à dire.
Chris : Bah en même temps c’est pas comme si c’était intéressant ! *rire* C’était juste, on voulait faire un truc différent, ça collait bien aussi avec la direction de ce morceau qui était… différente. 

Sur l’album Oddity, vous avez deux invités : Cindy Sanchez pour le titre Here Comes The Rain, et Lionel Forest sur la chanson Nothingness. Comment les avez-vous contactés et comment s’est passée la collaboration ?
Chris : Pour commencer avec Cindy Sanchez, c’est la chanteuse d’un groupe qui s’appelle Lisieux qui est sur Toulouse, en fait je connaissais son groupe via les réseaux sociaux, les vidéos YouTube, voilà et j’ai bien aimé, j’avais déjà le projet de proposer à une fille de chanter, d’avoir une voix féminine, et du coup en écoutant Lisio j’ai proposé la collaboration, donc j’ai envoyé l’instrumentale, les paroles et ça a matché, on s’est pas rencontré, elle a enregistré elle de son côté elle nous a envoyés les pistes on a mixé et voilà ! Et pour Lionel c’est un copain à nous parce que lui il joue dans un groupe, Cløudy Skies ils sont de la région parisienne comme nous et on se connait depuis quelques années maintenant et on aime bien sa voix, un côté Nick Cave, un peu gras et tout et on s’est dit ça colle bien. 

Merci. Un autre titre qui m’a intrigué est Monday Is Fry Day, en particulier grâce à son nom. Quelle est son histoire ?
Vincent : C’est vrai que le titre est intrigant ! Je vais pisser, pardon.
Chris : C’est la première fois que je me permets de raconter des histoires parce qu’effectivement c’est… enfin voilà on s’en branle. C’est par rapport à Ted Bundy, quand il était sur la chaise électrique, c’était un mardi et les gens avaient des pancartes disant “Tuesday is Fry day” puisqu’il se faisait griller. Donc je suis parti là dessus, après pourquoi Monday et pas Tuesday c’est parce qu’on a, enfin, je fais de la musique depuis très très longtemps avec Stevan, ensemble qu’on a fait Monday… je ne sais plus comment il s’appelait hein, et après au delà de ça j’ai juste, c’est une histoire, c’est l’histoire de quelqu’un qui attend d’être exécuté sur une chaise électrique, et qu’est ce qu’il se passe dans sa tête à ce moment là. Un peu comme nous ce matin à 10h30.

*soupir*
Chris : Ah c’est un peu comme ça, moi je vis un stress insupportable donc mon Monday is Fry day c’était tout à l’heure, un Saturday…

Ecoute la prochaine fois je vous laisserai tranquille hein, il y a pas de souci !
Chris : Nan pas toi, 10h30, c’est le monde, c’est la beauté du Hellfest, c’est tout ça…

C’est la fatigue aussi.
Chris : Ouais, et le stress.

Là je vois qu’il n’y en a plus trop de stress, vous êtes plutôt détendus, c’est cool
Chris : Absolument pas, si tu savais ce qu’il se passe dans nos têtes là…
Stevan : Non, si ça va, ça va, c’est plus relax que ce matin 10h25. 

Il me reste trois questions.  Le groupe a signé avec Frozen Records pour la sortie de cet album, comment s’est passé le contact et comment se passe la collaboration ?
Stevan : Le contact avec le label s’est fait naturellement, en fait il y a quelques mois par le biais des réseaux ils ont eu l’occasion d’écouter l’album et ils l’ont adoré et ils ont proposé ce contrat…

Ah c’est eux qui sont venus vous chercher c’est ça ?
Stevan : Oui et non, parce qu’on est rentré en contact avec eux.
Chris : Effectivement c’est des gens qu’on connait déjà d’avant. Enfin…
Stevan : On les connaît déjà d’avant, ils nous avaient proposé de faire un concert l’année dernière…
Chris : Il y a eu une motivation sur la sortie de cet album qui était vraiment…

Forte ?
Chris : Ouais ! Une vraie gouache, un vrai truc, et une communication … enfin on a rien à dire c’est assez…
Stevan : ça se passe bien !
Chris : Très très bien ! 

Bien ! Vous avez prévu un nouvel album de ce que j’ai compris, vous allez rester chez eux ?
Stevan : Oui ! Le prochain album, le troisième qui sort fin septembre, le 29 Septembre précisément, sortira chez Frozen Records dans les versions CDs, vinyles et vinyles collector.

D’accord. Petite question perso, puisque vous êtes en festival, vous avez joué, maintenant vous êtes festivaliers, vous avez prévu de voir des groupes, aujourd’hui, demain ?
Stevan : Ouais ! Aujourd’hui… ça a même commencé hier en fait, puisqu’on avait très hate de voir Botch un groupe de la scène Post Hardcore des années 2000, ils sont pas de Boston eux, il me semble pas. C’était très bien… Carpenter Brut… Ce soir j’aimerai bien voir Meshuggah pour la bonne tartasse dans la gueule …
Chris : Moi je suis très déçu parce qu’à priori Booba n’est pas ici *rire*
Stevan : Iron Maiden aussi, Porcupine Tree aussi.
Chris : Et on a loupé Loathe ! C’est très très similaire à Deftones mais c’est super !
Vincent : Ca y est je suis de retour ! Et ça c’est super bien passé mon pipi !

Vous me fatiguez. Bon, tiens, et toi qui viens de revenir, quels t’as prévu de voir ?
Vincent : Alors le souci c’est qu’il y a énormement de groupe de merde au Hellfest me disait Chris il y a 5 minutes *rires* et euh, nan, j’ai prévu d’aller voir Carpenter Brut, Meshuggah, j’ai vu Botch hier c’était mortel, Porcupine Tree !

Vous me faites la même liste ! *rires*
Chris : … et puis Maiden pour comme ça, parce que c’est la nostalgie ! Et puis j’enchaînerai sur Metallica, Sepultura, un petit Slayer, et euh… Russian Circles, Cult of Luna… euh, on va voir quoi d’autre attends j’oublie là… Amenra, ah merde ils sont déjà passés… Euh… Katy Perry, qui apparemment nous a prévu un truc monstrueux pour cette année, enfin voilà ill y a encore un paquet de trucs à voir d’ici Dimanche soir ! 

… Merci, je pense que je vais aller sortir sous le soleil me cramer là. *rires* Bon dernière question, si vous deviez choisir un musicien en tant qu’invité pour le prochain single, qu’est ce que vous choisiriez ? Vous avez une idée ?
Vincent : Pour moi ce serait… Vincent Bemer, batteur de Nature Morte. Pour moi c’est vraiment, si je peux avoir la chance de jouer avec ce mec…
Stevan : Moi ce serait Mike Patton, pour l’opportunité d’avoir un vrai chanteur  ! *rires*
Chris : Moi je me lance dans une carrière solo je vous le dis tout de suite ! J’arrête les collaborations, ils me saoulent !

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