Review 1927 : Monosphere – Sentience

Monosphere continue sur sa voie.

Après un premier album en 2021, le groupe composé de Kevin Ernst (chant), Max Rossol (guitare), Valentin Noack (guitare), Marlon Palm (basse) et Rodney Fuchs (batterie) annonce en 2023 la sortie de Sentience, son deuxième album.

Preface nous ouvre en douceur les portes de cet univers étrange, où claviers et voix dansent ensemble avant d’être rejoints par les autres instruments tout en offrant une approche brumeuse et lancinante qui nous mène à Borderline Syndrome, une composition nettement plus agressive. Les racines Metalcore furieuses fusionnent avec les éléments Post-Metal lourds tout en plaçant des patterns complexes avant de s’éteindre pour laisser la quiétude nous envahir, laissant parfois des vagues de rage resurgir, puis Smoke & Wires propose un son inquiétant tout en revenant dans une violence contrastée par certaines sonorités pesantes. Dissonance et influences Hardcore se font aisément ressentir dans ce long titre explosif, qui laissera place à la plus courte mais tout aussi ravageuse Friends & Foes, qui n’hésite pas à engager les éléments les plus abrasifs pour renforcer ses riffs saccadés, accompagnés par Mirza Radonjica (Siamese). Hurlements et chant clair se relaient avant de laisser Bleak nous offrir un moment de quiétude avant de laisser les riffs hachés refaire surface, tout comme sur Ava et ses leads entêtants, accompagnés par quelques samples majestueux qui viennent créer un contraste avec la sauvagerie que le groupe peut déployer. Human Disguise prend la suite avec un son assez sombre qui s’éteindra bien vite pour laisser place à des parties plus virulentes, puis Living Flame lui emboîte le pas pour mêler des parties aériennes dissonantes à ses éléments ravageurs. Les passages massifs complètent les samples, qui reprendront plus calmement pour laisser Intermission nous autoriser deux minutes de répit en compagnie d’une instrumentale apaisante avant que Method Acting ne lui redonne toute son énergie dissonante et cinglante. Une dose de douceur est également prévue, mais elle s’enflammera pour gagner en intensité et nous mener à Turing Test et à ses sample vocaux explicatifs, régulièrement brisés par la fureur d’une rythmique pesante complétée par le chant saturé, en compagnie de Jim Grey (Caligula’s Horse). Sentience, le titre éponyme, viendra clore l’album en liant quelques sonorités aériennes avec un chant clair intense, laissant finalement le néant s’installer.

L’évolution de Monosphere est évidente, montrant à nouveau que le groupe sait habilement manier la douceur mais également la fureur, pour donner à Sentience une diversité incroyable et une richesse folle.

80/100

English version?

Quelques questions à Rodney Fuchs, batteur et compositeur du groupe de Prog/Post-Metal moderne Monosphere.

Bonjour et tout d’abord, merci beaucoup de m’accorder de ton temps ! Pourrais-tu vous présenter, le groupe Monosphere  et toi, sans utiliser les étiquettes Metal habituelles ?
Rodney Fuchs (batterie): Bonjour, je suis Rodney, batteur et principal compositeur de Monosphere. Je dirais que nous sommes un groupe qui vise un son inhabituel, diversifié et expérimental. Nous essayons vraiment d’incorporer toutes les choses que nous aimons dans la musique et de nous inspirer des films, de la littérature et de l’art en général pour créer quelque chose de nouveau qui n’essaie pas de ressembler à quoi que ce soit d’autre, même si nous avons beaucoup d’influences qui pourraient vous rappeler certains groupes que vous connaissez probablement déjà.

Comment relies-tu le nom Monosphere à l’identité musicale du groupe ?
Rodney : En fait, Monosphere est exactement ce que nous essayons de faire avec notre musique. Nous voulons tout rassembler dans une seule sphère musicale. Toutes nos influences sont là et il n’y a pas de frontière. C’est une seule sphère musicale, même s’il y a plusieurs genres réunis. C’est l’idée principale qui nous a poussés à choisir « Monosphere » comme nom de groupe.

Sentience, votre nouvel album, est sur le point de sortir. Qu’en pensez-vous ? Avez-vous déjà des retours ?
Rodney : Je suis très excité ! Nous avons déjà eu quelques retours et c’est mieux que ce à quoi nous nous attendions. Aussi stupide que cela puisse paraître, quand on fait un album, on a beaucoup de difficultés et on se demande souvent si on a fait le bon choix. Parfois, j’adore l’album, parfois je me dis que nous aurions pu faire mieux. C’est assez courant pour les personnes créatives de douter de leur propre art, donc je pense que cela nous aide à maintenir un certain niveau de qualité. Avec la sortie prochaine de l’album, je suis heureux que cette campagne touche à sa fin, car cela signifie que nous pouvons aller de l’avant et voir ce qui nous attend. En général, je peux facilement dire que c’est le meilleur album que nous aurions pu faire et nous sommes tous très fiers du résultat !

Comment résumerais-tu l’identité de Sentience en trois mots ?
Rodney : Sombre, complexe, extrême.

Comment s’est déroulé le processus de composition ? A-t-il été différent de celui de l’album précédent ?
Rodney : C’était légèrement différent. The Puppeteer a été entièrement écrit par moi-même, alors que cette fois, notre bassiste Marlon a contribué à certains morceaux. Ava et Human Disguise ont presque entièrement été écrits par lui, tandis que Living Flame est une collaboration 50/50 entre nous. Ici et là, il a ajouté quelques idées, comme le début de Borderline Syndrome par exemple. A part cela, chaque membre du groupe a ajouté sa propre créativité lorsque nous étions en studio. Toutes les chansons que j’ai écrites ont été composées assez rapidement. Method Acting a même été écrite peu de temps après avoir écrit The Puppeteer, je l’ai en quelque sorte recyclée et mise en forme, ce qui s’est avéré être un choix parfait pour l’album. À part cela, nous avions les mêmes idées : un concept fort, une fluidité musicale, un flux naturel et des motifs récurrents, pour n’en citer que quelques-uns.

Qu’en est-il de l’artwork, quelles étaient les lignes directrices et comment s’intègrent-elles à la musique que vous avez créée ?
Rodney : Je pense que l’artwork a été fait avant même que nous fassions l’album. Kevin, notre chanteur, expérimentait un peu et nous a montré une première ébauche, en nous disant que cela pourrait être notre prochaine pochette d’album. Nous l’avons tous adorée et nous pensons qu’elle reflète parfaitement le concept de l’album, qui traite de l’intelligence artificielle. D’un autre côté, je pense que la noirceur et la froideur de la pochette de l’album reflètent parfaitement le son de notre musique.

Où trouves-tu l’inspiration pour créer ta musique ?
Rodney : Pour moi, il y a de tout. Les nouveaux groupes que j’écoute, une performance d’un orchestre symphonique, une promenade en forêt, un film, ou même simplement des situations de la vie quotidienne. Il n’y a aucun moyen de forcer la créativité, mais parfois on ressent juste l’envie de commencer à écrire quelque chose et à la fin on a quelques riffs ensemble ou même un morceau complet. Je suis très inspiré par la musique en général et j’aime beaucoup écouter les nouvelles sorties, ce qui a toujours eu une grande influence sur mon écriture.

Quand j’écoute l’album, j’entends bien sûr des moments sauvages et agressifs, mais aussi des parties très calmes et douces. Comment trouves-tu le bon équilibre pour créer tes chansons ?
Rodney : C’est juste une question de feeling. Parfois, j’ai le sentiment que nous devons faire un partie acoustique après une section et c’est exactement ce que nous faisons. Bien sûr, il y a aussi beaucoup de réflexions sur la structure des chansons, car nous avons essayé de rendre nos morceaux plus adaptés à la chanson cette fois-ci (il suffit d’écouter Smoke & Wires ou Method Acting pour se rendre compte qu’il y a une structure de chanson assez basique), mais en général, il s’agit de ce que l’on ressent. La musique est une question de tension et de relâchement, et si la tension est à son paroxysme, vous pouvez la pousser encore plus loin, mais le point où les gens commencent à l’apprécier, c’est dès que la tension se relâche. Cela vaut pour l’harmonie, la mélodie, ainsi que pour les atmosphères et l’équilibre entre les parties lourdes et agressives et les passages calmes.

Il y a deux invités sur cet album, Mirza Radonjica (Siamese) et Jim Grey (Caligula’s Horse). Comment êtes-vous entrés en contact avec eux, et comment ces collaborations se sont-elles produites ?
Rodney : Je connais Mirza depuis longtemps et je l’ai rencontré plusieurs fois, alors je lui ai simplement demandé via Facebook et il était partant. Sa première version a été celle qui a fini sur l’album, donc inutile de dire que c’est un professionnel absolu et qu’il a réussi ! Une fois, j’ai fait une interview avec Jim Grey et nous avons beaucoup parlé de choses et de musique en général, ainsi que de sa performance sur Inertia. J’ai toujours eu le sentiment qu’il avait apprécié et qu’il ne m’oublierait peut-être pas (comme c’est le cas pour de nombreux musiciens, mais je ne blâme personne). Lorsque nous avons commencé à réfléchir à une performance orale, c’est le premier nom qui m’est venu à l’esprit. Je lui ai également écrit sur Facebook et il était partant. Parfois, c’est aussi simple que cela.

Peut-être avez-vous une chanson préférée sur cet album ? Ou peut-être la plus difficile à réaliser pour l’album ?
Rodney : La préférée peut varier, mais je pense que Smoke & Wires est la plus complète et a quelque chose qui me rend très heureux. Le plus difficile à réaliser est sans aucun doute Method Acting – c’est le plus rapide, il y a beaucoup de blast beats et des sections rythmiques très bizarres. J’adore ce morceau, mais c’est un vrai défi, haha.

Penses-tu que tu continues à t’améliorer en tant que musicien et compositeur ?
Rodney : Absolument. C’était un très long chemin pour jouer Sentience quand nous avons commencé à l’enregistrer. Je me suis entraîné pendant plus de 8 mois pour atteindre le niveau suivant et le jouer en studio. En ce qui concerne le processus d’écriture, nous avons essayé de nouvelles choses cette fois-ci et nous sommes passés de 39 minutes à 54 minutes. C’était un peu plus difficile de rendre l’ensemble cohérent, mais je pense que nous avons tous grandi avec ce défi. Je pense que si nous n’avions pas le sentiment de grandir et de nous améliorer avec notre musique, nous pourrions nous remettre en question et évaluer si nous faisons toujours la bonne chose.

D’après Internet et setlist.fm, le groupe a joué quelques concerts en Allemagne, ainsi qu’un en Belgique et un en France. Comment se sont déroulés ces concerts, et comment vous sentez-vous de jouer en live ?
Rodney : Nous aimons tous jouer en concert, c’est la meilleure partie de la musique. J’aime parler aux gens pendant les concerts et voir leurs réactions. La France et la Belgique ont été de très bons concerts et nous espérons vraiment y retourner en 2024, car nous savons que la scène Metal française a beaucoup d’intérêt pour la musique Progressive et le Post-Metal. Ce n’est pas facile de se faire voir, surtout quand on vient d’Allemagne.

Y a-t-il des musiciens ou des artistes avec lesquels tu aimerais collaborer ? Que ce soit pour une chanson, ou peut-être plus.
Rodney : Il y en a certainement ! Je rêve toujours de faire un morceau avec Tommy de Between The Buried And Me. J’aimerais aussi entendre Loic de The Ocean sur l’un de nos morceaux. Mais ce qui a toujours été plus important, c’est d’avoir une connexion personnelle avec les gens avec qui nous collaborons. Je n’aurais pas osé demander à Mirza et Jim si je ne savais pas qu’ils me connaissaient, haha.

Pourquoi avez-vous décidé de rester indépendant et de sortir l’album seul ?
Rodney : Nous avons fait une sortie indépendante sur The Puppeteer et ça s’est bien passé. De nos jours, le business de la musique est très difficile. Nous avons commencé à présenter l’album à des labels pour voir s’il y avait de l’intérêt. Mais plus nous y pensions, plus nous voyions que nous pouvions le faire nous-mêmes, sans vendre l’album à un prix trop bas. En tant que petit groupe, nous ne recevons pas de grosses offres, ce qui signifie qu’à long terme, le label en tire des bénéfices, alors que nous n’avons un impact important que sur une courte période (autour de la sortie de l’album). Cette fois, nous avons pensé que c’était la meilleure façon de prendre le risque financier par nous-mêmes tout en restant propriétaires de notre musique et de nos licences, parce que nous sommes convaincus que nous récupérerons l’argent. Nous pourrions penser à un label pour le prochain album, mais nous sommes en 2023 et beaucoup de grands groupes se détournent des labels – alors qui sait si nous ne pourrions pas créer notre propre label et autoéditer l’album 3 à nouveau.

Connais-tu la scène Metal française ? Quels sont les groupes que tu aimes ?
Rodney : Je suis un grand fan de groupes comme Celeste, Déluge, Hypno5e ainsi que des groupes comme Gojira, Alcest, Uneven Structure évidemment. Nous avons eu la chance de jouer quelques concerts avec Celeste et Hypno5e, ce qui était génial ! J’aime aussi beaucoup Birds In Row, Klone, Resolve et Fall Of Messiah. Il y a beaucoup de groupes géniaux et j’aime l’attention que la scène Metal française reçoit grâce à des groupes comme Landmvrks qui ont vraiment fait leur chemin !

Si tu devais organiser un concert pour la sortie de Sentience, avec quels groupes aimerais-tu jouer ? Je t’ai laissé créer une affiche avec Monosphere et trois autres groupes !
Rodney : En fait, nous avons nos amis Senna et Xarise à notre concert de sortie, mais si je devais choisir les groupes de mes rêves absolus, le lineup serait : Between The Buried And Me, The Dear Hunter, Agent Fresco. Heureusement, nous avons déjà pu jouer avec TDH cette année, alors il nous en reste encore deux à faire, haha !

Dernière question amusante : à quel plat comparerais-tu la musique de Monosphere ?
Rodney : Je dirais probablement une pizza. Il y a une base solide avec beaucoup de saveurs différentes par-dessus – et puis nous aimons tous la pizza. On peut faire de la pizza de différentes manières et c’est ce que nous aimons dans notre musique.

C’était ma dernière question, merci à nouveau de m’avoir accordé de ton temps et pour ta musique, je te laisse les mots de la fin !
Rodney : Merci d’avoir pris le temps de m’interviewer. Nous apprécions vraiment votre soutien et nous sommes impatients de sortir Sentience. Chaque personne qui écoute Sentience est invitée à discuter avec nous de ce qu’elle aime dans cet album et nous apprécions vraiment que vous ayez pris le temps de l’écouter !

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