Review 3024 : Wehmut – III: Frühling

Au détour de mes errances, je découvre Wehmut.

Projet solo du musicien Johannes Riess (Boötes Void, Psychic Torture) créé en 2021, le groupe nous offre une sortie par an, et sa dernière se nomme III: Frühling, quatrième album studio, qui est édité via Naturmacht Productions.

On débute avec le son éthéré de la longue Geburt, une première composition qui nous autorise à progresser lentement dans son atmosphère planante avant d’y introduire la batterie pour proposer une touche plus énergique, puis enfin l’essence même de ce Black Metal Atmosphérique torturé fait de riffs éraillés et de hurlements. Bien que persuadé qu’il y en ait, je ne distingue aucune parole, juste ces cris saisissants qui s’apparentent presque à ceux d’animaux, et qui donnent vie à la rythmique brumeuse qui peine à s’apaiser mais qui nous autorise un instant de répit avant de reprendre sa douloureuse complainte. Les hurlements sont à la limite du supportable, mais ils finiront par prendre fin pour passer à Der erste Sturm où nous nous retrouvons d’abord face à une phase de douceur mais qui se laisse ternir par le retour du fantôme hurlant en arrière-plan pendant que sa musique nous transporte sans mal dans son flot tumultueux jusqu’à une pause aux racines Folk apaisantes. Le projet puise dans ses influences Blackgaze pour lier les deux extrêmes avec des effets lancinants jusqu’à ce que l’eau nous accueille pour Strahlenbüschel, la pause instrumentale salvatrice de l’album, proposant de douces mélodies qui allient mélancolie et choeurs féminins pour un instant de quiétude. Comme on s’en doute, ce moment ne dure pas et le son s’assombrit dès que Kurz gesagt, mir geht’s nicht gut lui emboîte le pas, proposant une approche bien différente qui rappelle ces balades en forêt où plus rien n’a de sens et où on se laisse émerveiller par la nature pendant que nos pensées les plus moroses défilent. Ne parlant pas allemand, j’ai tout de même été chercher la signification du titre “Bref, je ne me sens pas bien”), et j’ai compris ce que le musicien réussit parfaitement à transcrire dans ses sonorités si profondes, si tenaces et surtout si déchirantes : sa détresse est réelle, et l’exprimer est tout aussi cathartique que naturel. Malgré quelques courtes éclaircies, les ténèbres hantent le projet, et elles reviennent inlassablement le hanter tout comme sur Ohnmacht-Angst-Wut où on note une approche bien plus agressive dès le début, mais aussi des rugissements qui n’hésitent plus à apparaître presque seuls, se montrant alors encore plus vulnérables entrecoupés par ces vagues lumineuses qui rejoignent Alles wird enden, auch der Schmerz. Les premiers instants semblaient plus optimistes, mais la saturation viendra nous confirmer que non, les ténèbres sont encore bien présentes dans l’univers du groupe, et qu’elles nous mènent à la baguette, flagellant notre esprit à son bon vouloir sous les hurlements torturés jusqu’au tout dernier instant.

Bien que très friand de la scène Black Atmosphérique allemande, je ne pensais pas découvrir un projet aussi intense que Wehmut ! Plus qu’un simple album (l’avant-dernier d’une quadrilogie ?), III: Frühling est un manifeste de douleur aussi vrai et saisissant que brut et enivrant.

95/100

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