Interview : Harakiri For The Sky

A l’occasion de la sortie de Maere, leur très attendu cinquième album, j’ai eu l’honneur de poser à J.J., vocaliste d’Harakiri For The Sky, quelques questions.

Chronique de Maere

English version?

Bonjour et tout d’abord merci beaucoup de m’accorder de ton temps. Comment décrirais-tu la musique d’Harakiri For The Sky à quelqu’un qui n’a jamais entendu parler du groupe ?
JJ (chant) : C’est une question vraiment difficile. Je dirais très mélodique et triste, mais d’un autre côté avec une étincelle de mélancolie et d’espoir. C’est également assez atmosphérique, à cause des guitares au son clair.

Comment avez-vous eu l’idée du nom à l’époque ?
JJ : Ca vient du nom d’un titre du groupe norvégien Snörras et du clip de Glosoli de Sigur Ros. J’ai toujours cherché un nom, qui peut être ressenti comme je ressens le Post-Rock : courir vers une falaise et m’envoler.

Maere, votre cinquième album, est sur le point de sortir. Comment vous sentez-vous à ce sujet ? Est-ce que l’album remplit vos attentes ?
JJ : Ouais, totalement, je pense qu’il a le son le plus approprié jusqu’ici, tout comme les titres qui sont comme nous avons toujours souhaité qu’ils soient. Je pense que nous avons beaucoup progressé en tant que musiciens et compositeurs, j’espère que nos fans pourront l’entendre dans Maere.

Peux-tu nous dire d’où son nom vient, et comment s’est passé le processus de composition ? Était-il différent des précédents albums ? La collaboration avec AOP Recods vous aide-t-elle avec votre musique ?
JJ : Bien sûr, AOP est un label qui nous soutient beaucoup, c’est pourquoi nous sommes avec eux depuis la première sortie. Pour Maere? le nom vient d’une sorte de cauchemar, une goule qui s’assied sur la poitrine de quelqu’un pendant la nuit et l’empêche de dormir. Mes paroles sont toujours assez similaires pour moi, un cauchemar qui m’empêche de dormir. Les compositions ont été arrangées entre les moins après la sortie d’Arson et l’automne 2019, le chant est arrivé un peu avant que le premier confinement n’arrive. Je pense qu’il diffère des précédents albums comme Arson, car il est beaucoup plus dépressif que tout ce que nous avons fait auparavant.

C’est déjà votre cinquième album en dix ans, quel est votre secret pour être aussi productif ? Penses-tu que c’est plus simple de travailler en tant que duo plutôt qu’en groupe complet ?
JJ : C’est définitivement plus simple, mais chaque groupe a sa propre méthode. Je pense qu’il n’y a pas de bonne ou de mauvaise manière de faire. Je pense que nous sommes aussi productifs, car nous pensons presque uniquement à la musique dans la vie, nous écrivons de la musique et des paroles, nous avons trouvé cette douce passion, et il y a tellement de choses qui arrivent tous les jours et qui valent la peine d’écrire dessus. C’est un catharsis journalier, c’est pourquoi nous travaillons autant sur du matériel neuf.

Vous avez demandé à nouveau à Kerim « Krimh » Lechner? d’enregistrer la batterie pour cet album, comment êtes vous entrés en contact avec lui ? Est-ce qu’il a ajouté sa touche, ou est-ce que les parties de batterie étaient déjà totalement écrites ?
JJ : C’est un ami de M.S. (guitariste et compositeur, ndlr), et il habitait en Autriche lorsqu’il a pris part pour la première fois à Harakiri For The Sky. La plupart de ses parties étaient déjà écrites par M.S., mais il a ajouté sa touche personnelle sur chaque titre en enregistrant. C’est un super batteur, et nous sommes contents qu’il ait pris part à l’album.

 Je sais que vos titres sont toujours très personnels, mais comment choisissez-vous des évènements à traiter ? Qu’y a-t-il d’autre qui peut vous inspirer pour écrire musique et/ou paroles ?
JJ : Tout ce sur quoi j’écris est une histoire qui est arrivée dans ma vie. Je ne peux pas m’imaginer écrire à propos de quelque chose que je n’ai pas traversé. Bien sûr les paroles sont très personnelles, et c’est également douloureux parfois, mais c’est une sorte de catharsis, j’ai vraiment besoin de traiter ces choses.

Qu’est-ce qui est écrit en premier, la musique ou les paroles ? Pourquoi ?
JJ : La musique vient en premier bien sûr, les paroles sont écrites lorsque le titre est déjà fini en tant que tel. Parfois nous jouons des parties séparées plus longtemps, quand ça colle à l’histoire, mais en général nous savons comment écrire des titres en faisant en sorte que les paroles et la structure du titre fonctionnent ensemble.

 J’ai personnellement ressenti plus d’influences Black Metal sur cet album, en comparaison avec les précédents, est-ce que vous considérez toujours votre musique comme un sous-genre de Black Metal ? Est-ce que vous aimez toujours jouer vos premiers titres ?
JJ : Bien sûr, le Black Metal sera toujours une partie très importante d’Harakiri For The Sky, mais ce n’est pas uniquement du Black Metal en tant que tel, quand on parle du genre et de ses racines dans les années 90. J’aime toujours jouer nos anciens titres en live, bien sûr, puisqu’ils sont toujours d’importantes parties du groupe. Mais d’un autre côté, j’apprécie surtout jouer nos nouveaux sons, parce qu’ils sont tout neufs, et également parce que la musique et les paroles sont plus touchantes et actuelles pour moi.

Sur cet album, vous avez deux invités, Neige d’Alcest et Voice de Gaerea. Comment décidez-vous avec qui vous souhaitez collaborer ? Est-ce que c’était différent de vos précédentes collaborations ?
JJ : Neige est un peu comme le héros de nos jeunes années, même s’il n’est pas vraiment plus âgé que nous. Mais il a écrit quelques-uns des albums de Post Black Metal les plus impressionnants quand il était encore très jeune, donc il a toujours eu une grande influence sur nous. C’est pour cela que nous lui avons demandé de prendre part à l’album, et nous sommes très contents qu’il l’ait fait. Il a l’une des voix les plus impressionnantes du Black Metal en général, que ce soit en chant hurlé ou clair. Pour ce qui est de Gearea, M.S. a rencontré Rouven il y a quelques années au Portugal, et il est directement devenu ami avec. Je l’ai apprécié également depuis le début, vu c’est quelqu’un qui vient du Hardcore comme moi, en écoutant Converge et des trucs comme ça. Également, sa voix est vraiment géniale et je pense qu’elle colle très bien au son.

Comment avez-vous choisi les singles à révéler en premier ? Est-ce que tu as un titre préféré sur cet album ?
JJ : Je pense que tout le monde a son propre favori sur l’album, mais lorsqu’on en vient au premier single, il faut faire un compromis et également penser à ceux qui marcheraient mieux avec une vidéo et tout. Mes favoris personnels sont I, Pallbearer et Us Against December Skies, car les paroles sont très significatives pour moi. Mais en tant qu’artiste, bien sûr, chaque titre a sa propre signification spéciale, car ça reflète tout le temps un moment de ta vie et ça a une signification plus profonde pour toi que pour quiconque.

Le dernier titre de Maere est une reprise de Placebo, ce qui est un peu éloigné de votre univers musical. Comment avez-vous choisi ce morceau à reprendre ? Est-ce que ça a été simple de l’intégrer à votre univers ?
JJ : Nous avons cette politique dans le groupe, si on reprend un titre ce ne sera jamais une reprise d’un titre de Black Metal. Donc on choisit principalement un morceau de Rock Indé ou du Grunge. Song To Say Goodbye a une signification spéciale bien sûr, vu que je l’ai beaucoup écouté à l’époque, j’avais 17 ou 18 ans et je déménageais de l’appartement de mes parents à Vienne. Donc je suis vraiment content qu’on ait choisi celui-ci. Mais également, les paroles collent très bien à Harakiri For The Sky je trouve.

J’ai eu la chance de voir Harakiri For The Sky trois fois en France, d’une toute petite salle remplie à Paris appelée Le Klub jusqu’à une grande scène au Motocultor. Est-ce que vous avez un rituel spécial ou une habitude avant un concert ?
JJ : Pas vraiment. Je pense que nous sommes les mêmes mecs sur scène que lorsque tu nous rencontres dans la foule ou en backstage, tout vient très naturellement. Et c’est ce que j’aime dans le fait d’être dans ce groupe. Ce n’est pas construit, c’est juste nous. Mais la plupart du temps, j’apprécie les petites salles plus que les gros concerts, car la foule est si proche de la scène, et tout est tellement plus honnête et pur.

Est-ce que c’est facile de jouer une musique aussi emplie d’émotions en face de personnes, et de leur hurler tes sentiments au visage ?
JJ : La plupart du temps oui, mais si j’ai eu une mauvaise journée ça peut également être difficile, c’est sûr. Mais généralement je suis dedans après quelques minutes, donc ça ne devient jamais ennuyeux ou quoi que ce soit, c’est juste génial, même si je peux être épuisé après 3 semaines de tournée à jouer tous les jours.

Est-ce que tu préfères les petites salles ou les grandes scènes de festival ? Est-ce que ça change quelque chose pour toi ?
JJ : Je préfère les petites salles, comme je l’ai dit juste avant, mais les deux aspects de la musique en live sont bien.

Peux-tu vivre des revenus de ta musique, ou est-ce que tu as toujours un travail à côté ? Comment est-ce que c’était au début du groupe ?
JJ : J’ai toujours un boulot évidemment, j’écris et je travaille pour SLAM Alternative Music Magazine, depuis 2011. C’est vraiment génial.

Est-ce que tu as des hobbies en dehors de la musique ? Quelle aurait été ta carrière de rêve si tu n’avais pas commencé la musique ?
JJ : Je suis à fond dans le skateboard depuis que je suis un petit salopard de 12 ans. J’aime également beaucoup la randonnée, comme tous ceux qui ont grandi dans les montagnes. Et bien sûr, j’aime vraiment voyager dans des pays étrangers et voir mes potes, j’aime aussi lire et je m’intéresse pas mal à la psychologie, mais je pense que c’est à peu près tout.

JJ au Motocultor 2019

Galerie

J’ai vu que vous avez dû reprogrammer votre prochaine tournée Européenne avec Gaerea? et Schammasch à cause de la crise du Covid, mais comment avez-vous réussi à réunir un tel line-up pour cette tournée ? Que peut-on en attendre ?
JJ : J’espère juste que ce sera une tournée comme on les connaît depuis les jours d’avant la pandémie, je ne sais pas ce à quoi les gens peuvent s’attendre, mais je pense que cette liste de groupe est plutôt cool.

Pendant que l’on parle du Covid-19, comment avez vous fait face à la situation de manière personnelle ? Est-ce que ça a affecté le nouvel album d’une quelconque façon ?
JJ : Pas vraiment, vu que l’album était déjà enregistré à l’époque, mais on a du reporter la date de sortie, qui était prévue pour septembre.

Et si je te demandais de comparer la musique d’Harakiri For The Sky avec un plat autrichien ? Lequel choisirais tu et pourquoi ?
JJ : Je pense que c’est l’humour noir et le cynisme qui est populaire dans la musique autrichienne, et je pense que c’est là où on se voit aussi, en tant que personnes et que musiciens. Mais comme tu le sais, nous avons quelques bons groupes de Black Metal comme Summoning, Ellende ou Weltenbrandt, donc je pense que nous sommes en bonne compagnie.

Quelle est ta meilleure et ta pire expérience en tant que musicien ?
JJ : Je pense que nous avons évité la plupart des mauvaises expériences. Je déteste juste vraiment quand les journalistes retranscrivent mal mes propos, mais c’est une chose qui arrive assez souvent, également car l’anglais n’est pas ma langue maternelle. Donc j’essaye de parler aussi clairement que je le peux, mais des fois ça arrive quand même.

Te souviens-tu de la toute première fois où tu as pris un instrument ? Quand et comment est-ce que ça s’est passé ?
JJ : Dans ma famille, tout le monde sait jouer d’au moins un instrument, et c’est pareil du côté de la famille de M.S., donc c’est arrivé assez tôt. J’ai joué de la flûte quelques années, puis j’ai pris une guitare à environ 14 ans, je reprenais des chansons de Misfits et des Ramones. Puis ça a été Darkthrone et toutes ces choses, mais je ne suis pas certain d’avoir été autre chose que médiocre guitariste avant l’âge de 23 ans haha.

Dernière question : avec quels groupes aimerais tu tourner ? Je te laisse créer une tournée avec Harakiri For The Sky et trois autres groupes !
JJ : Je dirais Alcest, Converge et peut-être Amenra, ce serait vraiment énorme.

C’était la dernière question pour moi, un énorme merci pour votre art merveilleux, et pour le temps que tu as consacré à répondre à cette interview. On se voit à Paris, je te laisse les mots de la fin !
JJ : Merci pour l’interview. J’espère que les tournées et la musique reviendront sur les rails dès que possible. Stay Gold.

Laisser un commentaireAnnuler la réponse.