Review 1869 : Toter Fisch – Aspidochelone

Toter Fisch hisse le pavillon noir.

Créé en 2013, l’équipage mené par Romain “Horgoth LordToad” Nobileau (chant), Rémy Robinot (basse), Jérémy Bayon (accordéon, Scumbags, ex-Hecate), Pierre Dri (batterie) et Tanguy Andujar (guitare, Forgotten Tales Brotherhood, ex-Anthares, live pour Saor) annonce pour ses dix ans la sortie d’Aspidochelone, leur ambitieux deuxième album.

L’aventure débute avec Awakening, une première composition qui présente rapidement les éléments inhérents au style du groupe, comme cette atmosphère épique sur laquelle les riffs accrocheurs naissent, entourés par les parties vocales. L’accordéon joue également un rôle extrêmement important, rythmant avec ses sonorités singulières les vagues de rage martiale, tout comme sur The Tongue, The Saber et ses accents entraînants qui créent un contraste avec les parties les plus brutes. Les samples sont également très nombreux sur ce titre, qui laissera finalement place à Petwos Call et à ses sonorités dansantes alourdies par une base rythmique sombre et écrasante, qui seront également rejointes par des parties vocales massives ainsi que par des tonalités inquiétantes. Le mélange reste fédérateur et sera sans aucun doute très efficace en live, en particulier le dernier break, avant que la mélancolie ne refasse surface avec Memories, qui sait mettre en valeur les sonorités les plus nostalgiques de manière très naturelle, même lorsque la rythmique se montre agressive et lourde. The Island fera revivre les éléments festifs du groupe, qui les mêle habilement à une approche énergique parfois empruntée au Death Metal ou à des influences plus obscures, mais également à ses racines Folk planantes en arrière-plan avant de nous autoriser un instant de répit avec le sample introductif d’Abyssal Beast, qui finira par nous plonger au coeur d’une bataille sans merci. Les influences Symphoniques sont parfaitement exploitées pour donner des éléments lancinants au morceau, tout comme sur The Bow où les mélodies résonnent entre les hurlements, créant une complémentarité naturelle qui ira même jusqu’à intégrer quelques parties de chant clair avant un final grandiose. Ritual revient aux tons dansants tout en se laissant dominer par une fureur omniprésente, rythmée par les orchestrations majestueuses et les racines Heavy des leads, avant de présenter Blessed And Chained qui se laisse guider par des hurlements sauvages tout en plaçant ses riffs enjoués. La rythmique sera sujette à quelques accélérations, puis elle laissera Neverending mettre ironiquement fin à l’album avec une composition instrumentale épique digne des plus grands films d’aventure.

Le nouveau chapitre de Toter Fisch répond parfaitement à l’attente que le groupe a créé auprès de ses fans, offrant avec Aspidochelone une petite heure de sons majestueux, furieux et épiques qui vous emportent aisément dans leurs filets.

85/100

English version?

Quelques questions aux membres du groupe Toter Fisch.

Bonjour et tout d’abord, merci de m’accorder de ton temps ! Comment pourriez-vous présenter le groupe Toter Fisch sans utiliser les habituelles étiquettes des styles musicaux ?
Pierre (batterie): Toter Fisch, c’est un groupe qui raconte les aventures fantastiques et inquiétantes de son équipage, en minimisant le côté fun et en insistant sur la part sombre de ses faits.
Tanguy (guitare) : C’est l’enfant maudit de Finntroll et Pirates des Caraïbes !

Aspidochelone, votre deuxième album, sort dans quelques semaines, comment vous sentez-vous ? Est-ce que vous avez déjà eu des retours à son sujet ?
Remy (basse), Romain (chant) et GG (accordéon): Impatients. Nous avons reçu des retours encourageants de proche et les premières chroniques ne vont pas tarder à tomber.
Tanguy : Après le parcours du combattant qu’a été la production de cet album et le fait que ce soit ma première sortie avec le groupe, je suis partagé entre l’excitation et l’anxiété.
Pierre : Soulagé ! Et un peu stressé, quand même…

Comment résumerais-tu Aspidochelone en trois mots ?
Le groupe : épique, sombre, intense

Aspidochelone sort six années après votre premier album, comment s’est passé sa composition ? Est-ce que tu as remarqué des changements, ou des évolutions dans le processus créatif ?
Romain : La composition a été bien plus exigeante que pour notre album précédent. Certaines compos sont antérieures à la création de Toter (2005 pour la plus ancienne). Et chacun a pu apporter sa touche, donnant une quantité impressionnante de variations et de compos…
Remy : La composition a été longue, le changement de line-up et le covid n’aidant pas… Je me suis personnellement bien plus investi dans Aspidochelone que sur notre album précédent, en participant activement aux arrangements. Je me suis aussi chargé de l’écriture des paroles et du concept, ce qui était une première pour moi, car jusque-là c’était plutôt l’affaire de GG. Ce fût un beau challenge mais je suis satisfait du résultat !
Tanguy : Honnêtement, pour ma part, le plus compliqué a été et de trouver ma place et d’appréhender le processus de création en groupe, moi qui n’avait jamais travaillé que tout seul dans mon coin. Ça a été un travail intense et extrêmement intéressant, qui non seulement m’a fait progresser dans ma façon de composer en me poussant dans mes retranchements, mais qui a également fait évoluer mes compositions vers quelque chose de plus grand, plus complet et plus abouti. La grosse cerise sur le gigantesque gâteau a été de collaborer avec Thibault Chavanis pour les orchestrations qui a su donner une richesse symphonique à notre musique au-delà de nos espérances !

Selon internet, l’aspidochélon est un monstre marin, une sorte de “tortue-île”. Pourquoi avoir choisi ce nom, et quel est le concept de l’album Aspidochelone ?
Remy : L’aspidochélon est en effet une créature marine à l’aspect d’île, qui porte de nombreux noms, de nombreuses apparences dans différentes mythologies et légendes. Il est toujours décrit comme un monstre faisant sombrer les marins qui auraient le malheur d’y accoster. L’idée de base était de trouver une suite aux aventures de l’équipage maudit du Toter Fisch après Yemaya. Après pas mal de recherches sur le bestiaire fantastique des océans, nous avons trouvé que cette créature serait une parfaite figure centrale pour cet album, à la fois mystérieuse, sombre et grandiose. Elle symbolise ici le passage du Toter Fisch dans un autre monde. L’album narre donc l’histoire de cet équipage errant, qui va croiser la route de l’Aspidochelone, puis leur voyage dans un monde de divinités vaudous, les Lwas, pour finalement signer un pacte avec elles. Il y a 2 lectures possibles à cette histoire, l’une étant très littérale, et l’autre plus personnelle, un peu rattachée à notre vécu en tant que groupe. Nous voulions rester sur un album concept, avec une histoire qui se déroule au fil des morceaux, mais en se concentrant plus sur la psyché, les émotions confuses de l’équipage pour plusieurs raisons, la première étant que c’est ce qui m’inspire le plus personnellement. De plus, nous craignions qu’une énième aventure de pirates tourne vite en rond et soit trop… bateau ! Nous avons à cœur de proposer une musique qui s’éloigne des clichés pirates, nous voulions donc qu’il en soit de même pour les paroles, sans pour autant trahir notre univers.

Je sais que c’est une question difficile, mais est-ce que tu as un morceau préféré sur cet album ? Ou celui qui t’a semblé le plus naturel à composer ?
Remy : Probablement The Bow, car c’est un morceau très Black Mélodique, avec une ambiance épique, mélancolique, et de très belles lignes de chant clair.
Pierre : The Island ! Pour son apparente jovialité qui s’assombrit pas mal, avec ce qu’il faut de riffs bourrins.
Romain et Tanguy : Ça serait sans doute Neverending, car elle représente une belle osmose de composition entre nous deux. C’est aussi celle où Tanguy s’est le plus amusé avec les orchestrations épiques, avec un fort aspect BO de film.
GG : Blessed & Chained pour son coté hyper martial et orchestral, son refrain Folk mais pas trop !

Tout comme Yemaya, votre premier album, Aspidochelone est une sortie indépendante, est-ce que c’est une volonté du groupe de rester indépendant ?
Le groupe : Nous étions partagés. D’un côté nous avons recherché un label qui apprécie suffisamment notre univers pour vouloir collaborer avec nous et nous pousser vers le haut. Et de l’autre, nous n’avions pas envie de signer pour signer. Malgré quelques réponses positives, nous avons choisi de sortir l’album en indépendant, faute de propositions vraiment intéressantes. Nous y réfléchirons de nouveau pour notre prochaine sortie, affaire à suivre !

On retrouve dans votre musique un contraste entre les éléments Folk entêtants apportés par l’accordéon et la base plus brute, comment arrivez-vous à atteindre un équilibre dans vos compositions ?
Tanguy : Pour moi c’est d’abord une question d’arrangement, de choix et de goûts personnels. Et un peu de chance aussi, on ne va pas se le cacher. Ensuite, ce sont tous les échanges au sein du groupe, lors du processus de composition. Nous avons une manière de fonctionner très démocratique, ça joue peut-être pour balancer l’ensemble. Au final, nous arrivons juste à un point où ça sonne bien à nos oreilles. Est-ce qu’il y a un juste équilibre, ça c’est à l’auditeur d’en juger !

Comment avez-vous découvert le Folk Metal, et plus précisément l’univers singulier du Pirate Metal ?
GG : Swashbuckle et Running Wild pour le Pirate Metal et Finntroll pour le côté Folk.
Romain : Finntroll pour le Folk et Alestorm pour le Pirate Metal, mais c’était après la création de Toter Fisch !
Tanguy : Suite à un cours sur le métissage musical au collège (coucou Mme Fablet !) entre musiques traditionnelles, savantes et musiques actuelles (Rhapsody / Eluveitie…)

Avez-vous des plans pour la suite de l’aventure Toter Fisch ? Notamment au niveau des performances live.
Le groupe : Pleins ! Nous travaillons sur quelques dates en France pour cette fin d’année et début d’année prochaine et espérons que notre album sera suffisamment bien reçu pour nous ouvrir les portes des festivals français et étrangers pour 2024. Nous avons également pleins de projets en cours : clips, nouvelle scéno, nouvelle setlist, nouveau merch… ça arrivera progressivement !

Je vous ai pour ma part déjà vus trois fois sur scène, entre le Cernunnos (2017 & 2020) et le Motocultor (2017), et j’ai immédiatement remarqué une esthétique travaillée. Comment avez-vous conçu vos costumes, et comment préparez-vous un live de Toter Fisch ?
Le groupe : Entre chinage et artisanat pour ce qui est des costumes. Quand à la préparation des lives, cela se fait le plus souvent spontanément pendant les répèt’, autours d’une (ou plusieurs) bière(s) !

Est-ce qu’il y a des musiciens ou artistes avec lesquels tu souhaiterais collaborer dans le futur ?
Le groupe : On adorerait enregistrer dans des studios mythiques qui sont pour l’instant hors de notre portée, comme l’Abyss studio de Peter Tägtgren. On aimerait aussi travailler avec des vocalistes qui ont une forte personnalité dans leurs chants comme nous l’avions fait avec Jen (de Volker) sur Mami Wata. Nous avons quelques pistes pour la suite mais c’est bien trop tôt pour en parler.

Est-ce que tu penses que tu t’es amélioré en tant que musicien avec cet album ?
Pierre : Oui, et il y a encore du travail! Le Captain a tendance à composer dans nos limites, du coup, on est obligé de monter d’un cran à chaque sortie. C’est le défi!
Tanguy : Entre les compositions et la technique personnelle, je pense que l’on a tous mis la barre au dessus pour cet album. Et certains riffs de Captain m’ont donné du fil à retordre ! #ritual
Romain : Oui, pour ce qui est de l’endurance et de certaines parties rythmiques au chant.

Avec quels groupes rêverais-tu de de jouer ? Je te laisse imaginer une date pour la sortie d’Aspidochelone avec Toter Fisch en ouverture, et trois autres groupes.
Le groupe : Finntroll, Moonsorrow, Fleshgod Apocalyspe

A quel plat pourrais-tu comparer la musique jouée par Toter Fisch ?
Pierre : Un plat créole. Du sucré/salé, pour varier les plaisirs, et une bonne grosse dose de piment pour relever le tout et cramer ceux qui ne sont pas prêts !
GG : Une pizza ananas (pour le côté caraïbes) et beaucoup de sauce piquante pour le côté Metal !
Tanguy : Une raclette … parce que j’adore les raclettes et je veux une raclette !

C’était ma dernière question, je te remercie pour ta disponibilité, et je te laisse les mots de la fin !
Le groupe : Merci de nous avoir offert l’opportunité de répondre à cette interview. Au plaisir de se croiser au détour d’un concert ou de notre release party a Lille le 16 Septembre ! Cheers !

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