Review 2576 : Usquam – Ex Nihilo

La génèse d’Usquam est sur le point d’arriver.

En 2025, Alain “Alwan” Nicolle, (basse/concept), Jessy “Christ” Vignolle (chant), Jonathan “Draugr” Diedrich (guitare) et Étienne “Eithenn” Gonin (guitare) nous proposent leur premier album, Ex Nihilo, avec le soutien de Source Atone Records.

L’album débute de manière assez majestueuse avec Altar Ego, un premier titre qui accepte autant les orchestrations que le chant saturé de Jessy, proposant des sons très agressifs ou plus mélodieux selon les passages. Le morceau atteindra son paroxysme avant de faire place à Axis Mundi et son blast ravageur, faisant autant appel aux hurlements ainsi qu’à quelques spoken words pendant la déferlante avant de repartir dans la déferlante entre Black et Death Metal. Athanor instaure une atmosphère plus inquiétante avec son introduction dissonante, mais la violence refait rapidement surface avec ses hurlements et riffs effrénés qui ne seront stoppés que par le final et ses quelques mots, laissant place au rituel d’Ego Sum (Qui Sum). Il est également rapidement effacé par la rage et le blast, maison quelques éléments y font à nouveau penser, surtout avec les choeurs, mais également les cris en français qui renforcent le côté pesant tout comme sur Arcana Nox où le son est volontairement lent, écrasant et surtout très sombre. Les mélodies sont également plus énigmatiques, mais elles laissent place à de l’agressivité sur Egocide, composition qui flirte d’abord avec les extrêmes de chaque styles tout en tissant sur des harmoniques ténébreuses. Le morceau ralentit et se montre très majestueux, ce qui rejoint certains moments de la furieuse The Mast où la rage est généralement préférée tout en proposant des leads mélancoliques qui se lient facilement avec les passages les plus rapides. Le final nous permet de souffler avant d’encaisser le groove brut de Symbol, où la rythmique est relativement saccadée tout en laissant une totale liberté au chant qui n’hésite pas à se balader de saturation à quiétude apaisante. Perseverance continue sur une dynamique assez étouffante, mais en même temps très noire qui s’oriente presque vers le Post-Black avec des harmoniques aériennes, mettant un point d’orgue intrigant à l’album.

La scène française regorge de pépites, et Usquam est assurément l’une d’entre elles. Si Ex Nihilo est un très bon album, l’écouter plusieurs fois est nécessaire pour en saisir toutes les nuances, et je ne peux que vous recommander de le faire pour l’apprécier à sa juste valeur !

90/100

English version?

Quelques questions à Alwan, bassiste du groupe Usquam, pour la sortie de leur premier album Ex Nihilo.

Bonjour et tout d’abord, merci de m’accorder de votre temps ! Sans utiliser les étiquettes Metal habituelles, telles que “Black Metal” ou “Death Metal”, comment pourriez-vous décrire le groupe Usquam ?
Alwan (basse) : On parle de Blackened Metal ou de Dark Metal. Un Metal sombre, “noirci” aux influences Black, Death, Post, Doom… Toutes les composantes sombres du Metal en fait. L’appellation Black Metal répond à des codes et à un cadre particulier. Il y a un son, des codes qui lui sont propre et qui font son essence, son identité. Ce n’est pas absolument pas le nôtre. Par profond respect pour ce style musical, on ne saurait définir notre style de Black Metal.

Le nom Usquam est relativement nouveau pour moi, d’où vient-il ? Comment le relies-tu personnellement à la musique du groupe ?
Alwan : Usquam signifie “quelque part”, “en quelque lieu” en latin. Il correspond bien à notre style musical composite qui ne s’arrête pas à un périmètre délimité à l’avance. Idéologiquement, il est également en adéquation avec notre volonté de penser hors des carcans. Les idéologies tuent. L’actualité le prouve chaque jour : penser dans un cadre unique, défini et non évolutif ne peut mener à rien de bon.

Ex Nihilo, votre premier album, est sur le point de sortir. Comment te sens-tu ? Est-ce que tu as déjà eu des retours à son sujet ?
Alwan : Un premier album est une étape importante. Si les jalons ont été posés avec notre premier EP Reborn, le groupe s’est structuré dans une identité beaucoup plus mature avec Ex Nihilo. Les premiers retours semblent reconnaître cette maturité dans les arrangements et la composition. Les influences orientales et mystiques ont également bien été perçues par le public et c’est une excellente chose !

Comment résumerais-tu Ex Nihilo en trois mots ?
Alwan : Mystique / puissant / mélodique.

L’album Ex Nihilo sort début 2025, pourquoi avoir choisi ce nom pour l’album et que signifie-t-il ?
Alwan : On peut le traduire du latin par “En partant de rien”. Pour un premier album, cela semble particulièrement adapté.  Par ailleurs, l’expression complète “ex nihilo nihil fit” signifie que rien ne vient de rien. On rejoint ici l’idée des influences multiples qui nous donne une identité propre et rejoint une des thématiques que l’on aime aborder, celle du cycle.

Le groupe Usquam a débuté en 2018, mais ne concrétise son premier album qu’en 2025, soit sept ans après. Comment s’est passé le processus créatif au sein du groupe ? Quelles sont les évolutions que tu pourrais mettre en lumière ?
Alwan : Dis comme ça, ça fout une claque ah ah ! Le groupe n’a commencé à prendre vraiment forme qu’en 2020 et le 1er EP est sorti en 2021. Le temps n’est pas tant celui de la création que celui de trouver un line up qui fonctionne musicalement et humainement. Tu passes 30 min à 1h sur scène quand tu tournes. Le reste du temps, ce sont des relations humaines de toutes sortes. Il est impératif que cela fonctionne ! C’était initialement un projet solo. Passer “du one man band” au groupe n’est pas chose aisée. En soit, la composition de cet album s’est faite sur un an. Les principales évolutions sont la maturité liée au temps de gestation avant la composition et l’arrivée de Jessy Christ au chant.

Quand j’écoute Ex Nihilo, je lui trouve une atmosphère très dissonante, très agressive, comment parvenez-vous à relier toutes les influences des membres pour créer quelque chose de cohérent ?
Alwan : Sur cet album, comme sur l’EP, j’ai composé toute la base seul… mais je m’appuie sur tous les autres membres et sollicite régulièrement leur point de vue avant de trancher. La cohérence n’est donc jamais un problème. A l’inverse, je veille à ne pas m’enfermer dans un schéma de composition et l’apport des autres est essentiel ! Eithenn a ainsi énormément apporté en termes d’arrangements guitare. C’est un instrumentiste talentueux avec qui on partage le même sens mélodique. Jessy a apporté énormément avec ses compétences vocales. Je cherchais à mêler des chants clairs et saturés, des influences orientales. C’est une chanteuse professionnelle et elle a su apporter tout cela et proposer des idées nouvelles avec une facilité déconcertante. Elle a pris connaissance des titres puis les as enregistrés en très peu de temps. C’est génial de bosser comme ça. Quant à Draugr, il apporte une stabilité vraiment essentielle dans le groupe. Il a été le premier à intégrer le groupe et en est donc un rouage important. Chacun à son rôle et cela fonctionne très bien comme ça…

Je remarque également une grosse diversité vocale sur Ex Nihilo, comment arrivez-vous à gérer les placements par rapport aux riffs ? Quelles sont vos influences et comment arrivez-vous à les mêler ensemble ?
Alwan : La diversité vocale s’appuie naturellement dans notre cadre de composition : les titres ne sont pas pensés en riffs mais ce sont des chansons à part entière. C’est une approche à part entière. Empiler et enchaîner des riffs, c’est ce que font beaucoup de groupes de Metal.  Cela peut être très technique, bien agencé et interprété… mais cela ne fait pas forcément de bonnes chansons. Au final, seul un public de musiciens y est réellement réceptif. Le terme peut sembler sonner “easy listening” mais c’est assumé : nous écrivons des chansons avec un capital de mélodies que l’on peut retenir. Cette ligne est l’une des signatures d’Usquam.

Je remarque que la plupart des paroles sont en français, mais aussi les titres en latin, pourquoi avoir fait ce choix ?
Alwan : Depuis le premier, on chante en trois langues qui ont toutes leurs caractéristiques propres. L’anglais pour sa musicalité, le latin pour ses fondements sacrés et philosophiques et le français car c’est notre langue maternelle et qu’elle a une richesse mélodique extraordinaire. Ce chant composite est un marqueur de notre identité. Pourquoi choisir ?

Je sais que c’est une question difficile, mais est-ce que tu as un morceau préféré sur cet album ? Ou celui qui t’a semblé le plus naturel à composer ?
Alwan : Difficile effectivement… mais en s’appuyant sur la réponse à ta quatrième question, on pourrait dire qu’Altar Ego, notre premier single, est assez représentatif car il allie mystique, puissance et mélodie.

Ex Nihilo sort en collaboration avec Source Atone Records comment se passe la collaboration avec eux ?
Alwan : Nous nous posions la question de l’autoproduction mais avons contacté un nombre très restreint de labels pour leur proposer la sortie de cet album. Ils ont accroché la musique et les choses se sont faites naturellement. Comme avec tout partenariat, on souhaite cette collaboration-là plus constructive possible.

Je n’ai pas trouvé de trace d’un quelconque live pour Usquam à ce jour, comptez-vous un jour monter sur scène pour interpréter vos morceaux ? Si non, pourquoi ?
Alwan : Le premier EP est sorti avec la pandémie de COVID donc pas de live possible puis il y a eu une longue période consacrée à des projets extra-musicaux. La composition de l’album à ensuite focalisé toute notre attention. Pour cet album c’est différent et des dates sont prévues entre mars et avril 2025, dont la seconde édition du festival Atone Mass organisé par notre label. Nous démarchons également des festivals et organisateurs pour faire découvrir notre univers et le défendre devant le plus grand nombre.

Quels sont les prochains projets pour Usquam ?
Alwan : Sur le travail en coulisse, on planche sur un nouveau clip. On cherche aussi à partager l’univers du groupe, en abordant des thèmes clefs pour nous, au travers de plusieurs épisodes podcasts (l’utilisation de L’I.A, les thématiques abordées dans les paroles…) C’est une façon d’aller plus loin dans les arcanes du projet. Côté scène, on prépare une résidence pour mettre au point notre formule live qu’on aimerait très… lumineuse. Ensuite, on va essayer de multiplier les concerts.

Est-ce qu’il y a des musiciens ou artistes avec lesquels vous souhaiteriez collaborer dans le futur ?
Alwan : Faire chanter Marilyn Manson sur un titre. T’as pas ça dans tes contacts ? ^^

Penses-tu t’être amélioré en tant que musicien avec cet album ?
Alwan : Pas tant en tant qu’instrumentiste mais en tant que musicien, oui. A titre personnel, j’ai appris à jouer des percussions dans un orchestre de musique traditionnelle celtique ces deux dernières années. Cela m’a énormément aidé à ressentir la « pulse » essentielle au jeu collectif. Envisager la musique hors du cadre Metal apporte beaucoup !

Avec quels groupes rêves-tu de jouer ? Je te laisse imaginer ta date de rêve avec Usquam en ouverture, et trois autres groupes.
Alwan : Ouvrir pour Dimmu Borgir, Behemoth et Carcass. Allez, il faut croire en ses rêves… ^^

Dernière question : à quel plat pourrais-tu comparer la musique d’Usquam ?
Alwan : A un curry indien bien pimenté accompagné d’un bon verre de Bourgogne. Miam !

C’était ma dernière question, je te remercie pour ta disponibilité, et je te laisse les mots de la fin !
Alwan : Merci pour cette interview. Grâce à toi, on connait enfin notre plat totem ah ah… Longue vie à Acta Infernalis !

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