Interview : Anatomia

Peu de temps avant la sortie de Corporeal Torment, le quatrième album d’Anatomia, j’ai eu l’opportunité de poser quelques questions à Takashi Tanaka (batterie/chant) et Jun Tonosaki (basse/chant).

Chronique de Corporeal Torment

English version?

Bonjour et tout d’abord, merci beaucoup de votre temps ! Pourrais-tu vous présenter, le groupe Anatomia et toi, s’il te plaît ?
Takashi Tanaka (batterie/chant) : Salut, je suis Takashi, et je viens de Tokyo au Japon. Je joue dans Anatomia, Transgressor, Necrophile, Wormridden, et tous ces groupes sont actuellement actifs. De manière générale tous ces groupes jouent du Death Metal, mais chacun dans un style légèrement différent. Anatomia a été formé en 2002, et joue un Death Metal aux accents Doom lents, c’est le groupe qui joue la musique la plus lugubre et abyssale auquel j’appartiens.

Anatomia a donc été créé en 2002, que représente le nom du groupe pour toi ?
Takashi : J’ai créé le nom, et l’idée était de prendre un morceau du nom de ma démo préférée de tous les temps, Anatomia Corpolis Humani par Grave. Nous aimons aussi la manière dont ça sonne, et la signification du nom qui est assez similaire à “autopsy” pour représenter notre direction musicale au début.

Corporeal Torment, le quatrième album studio d’Anatomia, va bientôt sortir, comment vous vous sentez à ce sujet ?
Takashi : Nous en sommes vraiment contents, et tout particulièrement de le sortir avec les labels de nos bons amis Me Saco Un Ojo et Dark Descent. On a hâte de collaborer avec ces labels pour la première fois.

Comment s’est passé le processus de composition ? Est-ce qu’il était différent de l’album précédent ?
Takashi : Eh bien, c’était plus simple en fait. Celui-ci a été enregistré après que l’on soit redevenu un duo, et nous pouvons tous les deux enregistrer des morceaux par nous-mêmes, vu que nous possédons tous les deux notre matériel d’enregistrement à la maison maintenant. Donc on peut écrire ou enregistrer quand on veut, et échanger des idées. Le processus d’écriture était plus simple et moins contraignant qu’avant.

Sur cet album, j’ai senti une sorte de diminution de la brutalité. Par exemple, sur le premier titre on trouve une impressionnante partie de blast beat, puis ça ralentit progressivement. Est-ce que vous avez ressenti la même chose ? Est-ce que c’était quelque chose que vous avez cherché à créer ?
Takashi: C’est vrai, mais c’est ce que nous voulions. Les titres rapides ne sont pas toujours violents. Nous aimons écouter du Brutal Death qui joue plus vite et très bien, mais nous aimons plutôt jouer lentement. Nous avions besoin de parties plus atmosphériques, et pas du tout de riffs techniques.

Depuis 2002, et malgré quelques changements de line-up, Anatomia n’a jamais oublié ses racines, forgées dans le Doom/Death le plus putride et le plus écrasant. Est-ce que vous avez ressenti des changements dans le groupe ?
Takashi : Pas vraiment. Je pense que peu importe la musique que nous jouons, nous sommes toujours différents des autres, et nos racines principales n’ont pas changé ou ne changeront pas. Bien sûr nous ajoutons plus de choses atmosphériques/ambiantes maintenant, mais nous le faisons dans le bon sens je pense. Quelque chose de très sombre et abyssal.

Le groupe est à présent un duo, est-ce que c’était facile de composer en tant que duo ? Peux-tu me dire qui a joué les guitares sur l’album ? Est-ce que vous prévoyez d’engager un guitariste pour les concerts ?
Takashi : Oui, c’est plus simple maintenant. Jun a joué tous les instruments à cordes pour l’enregistrement, et j’ai joué de la batterie ainsi que le chant. Nous avons un guitariste de session pour les concerts. Makoto, qui vient d’un groupe de Funeral Doom, Funeral Moth, joue avec nous. C’est un ami à nous depuis pas mal d’années, et il nous a rejoints en 2019.

Où trouvez-vous l’inspiration pour écrire musique et/ou paroles ? Est-ce que ça provient uniquement de la musique que vous écoutez ou d’autre chose, comme des livres, des films, l’art en général, ou quelque chose d’autre ?
Takashi : A propos des paroles, je trouve les idées de films d’horreur, principalement des classiques mais également des nouveautés gores, incluant les films japonais. Je n’ai pas de titres précis à mentionner cependant. Et je trouve aussi de l’inspiration des meurtres et affaires étranges qui se passent ici au Japon. Concernant la musique, ça vient principalement de ce que nous écoutons. J’écoute principalement du Death Metal, alors que Jun n’écoute pas que du Death Metal, mais aussi de l’Ambient/Noise, du Rock progressif, etc…

Je sais que la crise du Covid a annulé pas mal de choses autour du monde, mais comment est-ce que ça a affecté le groupe ? Comment le Japon a-t-il réagi à la crise mondiale ?
Takashi : Ca nous a grandement affectés. Tous les shows bookés ont été annulés, et les tournées l’ont également été. Nous avions un plan pour jouer en Indonésie qui a été reporté, ainsi qu’une tournée avec Transgressor en Australie, une tournée japonaise avec Fetid… tout a été annulé. Bien que nous ayons perdu ces concerts, nous avons pu nous concentrer sur la création de nouveaux morceaux, donc c’est ce que nous avons fait. Le gouvernement japonais a eu une réaction par rapport à la crise différente des autres. Nous n’avons pas de confinement, donc les restaurants sont ouverts, le shopping et les voyages sont autorisés, et rien n’est imposé ici. Mais en faisant comme ça, nous luttons et nous sommes assez lents pour contrôler la crise. Et au-delà de ça, il y a eu de gros dommages concernant l’économie, et nous n’avons pas reçu de vaccin.

Même si malheureusement le futur est incertain pour l’instant, avez-vous déjà des plans pour la sortie de l’album, ou même pour les prochaines étapes du groupe ?
Takashi : Nous avons des plans et discussions concernant le prochain album. Nous travaillons actuellement sur des sorties en split, mais dès que nous aurons fini avec ça, nous allons avancer concernant l’écriture du prochain album. Nous sommes très productifs en ce moment, on écrit de nouveaux morceaux. On a en ce moment quelques nouveaux splits dans un futur proche: un split 12” avec Ruin, un 12” avec Undergang et un 7” avec Druid Lord. Tout va sortir cette année.

Qu’est ce qui vous a amenés à aimer et jouer du Death/Doom ? Est-ce que vous aimez d’autres styles de musique ?
Takashi : Je pense que les albums Scream Bloody Gore de Death et Severed Survival d’Autopsy étaient les plus gros albums de Death Metal à mes yeux. J’étais sous le choc quand ils sont sortis, et quand je les ai écoutés pour la première fois. J’ai grandi avec différents types de musique. J’aime le Rock classique, la Pop des années 80/90, le Jazz, la Fusion, la musique Classique.
Jun Tonosaki (basse/chant) : Je me souviens avoir emprunté à un camarade de classe, quand j’étais au lycée, la compilation d’albums Speed Kills III qui contenait des titres de Death et Possessed. J’étais totalement subjugué par cet album. J’écoutais de la Pop des années 80 quand j’étais plus jeune, et j’aime toujours un peu la Pop, grâce à YouTube.

Vous souvenez-vous de la première fois où vous avez joué d’un instrument ? Quand et comment est-ce que ça s’est passé ?
Takashi : Ma famille était très portée sur la musique, alors j’ai commencé à prendre des leçons de piano quand j’avais 6 ans, donc c’est mon premier instrument. Quand mon frère aîné de trois ans est entré au lycée, il a commencé à jouer de la guitare électrique, et je jouais souvent du Metal avec lui, donc c’est quand je jouais de la batterie et de la guitare. On reprenait Ratt, Mötley Crüe, Quiet Riot, et ensuite plus tard on jouait du Thrash Metal comme Kreator, Sodom, Destruction, Slayer
Jun : J’avais 20 ans quand j’ai joué en live pour la première fois, et c’était avec un groupe appelé Sudondeath. Avant de rejoindre le groupe, j’étais chanteur pour un groupe local dans la préfecture d’Aomori qui était un groupe de reprises, mais ensuite j’ai vu une annonce dans un magazine de musique, un groupe de Tokyo qui cherchait un bassiste/chanteur, je les ai immédiatement contactés et rejoins, donc j’ai déménagé à Tokyo. C’est là où j’ai commencé à jouer d’instruments.

J’aime beaucoup la culture japonaise et le Metal japonais, mais que pouvez-vous nous dire à propos de la scène Metal au Japon ?
Takashi : La scène Metal est assez grande et unique je pense. Il y a beaucoup de groupes de Metal ici, mais ce n’est pas comme en Europe. Le pays est plus petit, donc la scène en termes de taille est très petite. Seulement un ou deux festivals de Metal uniquement, et les tickets sont très chers. Le Death Metal et Grindcore sont beaucoup plus underground comparés à ces groupes populaires qui tournent, donc il y a un grand fossé.
Jun : Il y a beaucoup de bons groupes qui jouent bien et qui sont de relativement bonne qualité, mais je pense que peu de groupes jouent dans leur propre style, ou quelque chose de très original.

Quels sont vos groupes japonais préférés ? Est-ce que vous considérez le Visual Kei comme du Metal ou pas du tout ?
Takashi : Eh bien, il y a beaucoup de bons groupes ici. Pour en nommer quelques-uns, Invictus, Mortal Incarnation, Butcher ABC, Coffins, Zombie Ritual, Parasitario, Mortify, Taste… J’aime Miasma Death, un groupe de Death un peu Doom qui joue du Death sombre, obscur… Le Visual Kei n’est pas du Metal pour moi. Je ne le connais pas très bien cela dit. Je considère ça uniquement comme du Rock ou du Hard Rock.

Qu’est-ce que vous aimez dans votre musique que vous ne trouvez pas dans la musique d’autres groupes ?
Takashi : Probablement le fait qu’en incluant à la fois des parties rapides et lentes dans nos titres, nous sommes capables de créer quelque chose d’unique, tu vois, en allant au delà du Death Metal, qui est mixé avec du Doom/Stoner, des éléments Ambient/Noise, et du chant guttural.
Jun : Je suis d’accord avec Takashi concernant la musique en elle-même, mais je voudrais également exprimer le fait que je suis vraiment content de pouvoir être créatif sans ressentir de stress, être capable de sortir de la musique, enregistrer par nous-mêmes lorsqu’on en a envie, et également ajouter des arrangements au clavier, qui sont toujours mes idée, et qui sont toujours très bien acceptées. Et je suis pleinement satisfait de jouer en dehors du Japon, de faire des tournées, de jouer à des festivals, etc… sans aucun stress. Tu sais, il n’y a pas beaucoup de groupes japonais qui maintiennent des activités en dehors du Japon, mais nous le faisons bien. J’aime ces parties, et je pense que c’est quelque chose que l’on trouve difficilement chez les autres.

Est-ce que vous avez des hobbies en dehors de la musique ?
Takashi : Les aquariums. J’ai beaucoup d’aquariums avec différents types de poissons tropicaux d’Amérique du Sud, et j’aime les élever. Aussi, j’aime faire de la moto, et me promener avec. J’avais de grosses motos au-delà de 1000cc, comme une Suzuki GSX-R1100, une Kawasaki ZZ-R1100… Après avoir eu deux enfants, je n’ai plus assez de temps pour faire ça.

Comment avez-vous découvert le Metal ? Avec quels groupes ?
Takashi : Comme mentionné un peu plus tôt, quand j’avais 11 ans, je crois, quand mon frère aîné de trois ans a commencé à aller au lycée, et qu’il a rapporté des cassettes de Metal, je les écoutais avec lui. Des groupes de Metal de L.A. comme Ratt, Mötley Crüe, Quiet Riot, WASP, Keel

Quelle est votre meilleure et votre pire expérience en tant que musiciens ?
Takashi : La dernière fois que nous avons joué en dehors du Japon, c’était le concert de Mexico en Mars 2020, juste avant que la pandémie mondiale ne débute. Ca aurait été impossible si le festival avait été une semaine après. Nous avons pu aller à Mexico, rencontrer un tas d’amis, jouer un super concert et rentrer en toute sécurité à la maison sans problèmes. C’était le meilleur, et on a pris tellement de plaisir. Je ne trouve pas de pire expérience.
Jun : La meilleure partie, c’est que nous pouvons aller dans beaucoup de pays différents et jouer des concerts, rencontrer des fans, des anciens et nouveaux amis, profiter de bonne nourriture… Comme Takashi le dit, je ne trouve absolument rien de mauvais. Du moins s’il y en a, ce serait simplement une histoire fun.

Est-ce que vous avez entendu parler de la scène Metal française ? Quels groupes français connaissez-vous ?
Takashi : Oui, j’ai grandi en écoutant de vieux groupes de Death Thrash français comme Mutilated, Massacra, Agressor… concernant les plus récents je pense à Necrowretch, Bloody Sign, Cadaveric Fumes, Repugnizer, Chaos Echoes, Atavisma… Je connais plus de groupes mais ils ne me viennent pas à l’esprit.

Et si je vous demandais de comparer la musique d’Anatomia à un plat ? Lequel choisiriez-vous et pourquoi ?
Takashi : Un plat haha. Ok, peut-être un bouillon de moelle de bœuf. J’ai mangé ça à Singapour, c’est vraiment brut, ça ressemble à quelque chose qui flotte dans du sang rouge, et tu manges ça directement en aspirant la moelle de l’os. Un truc dans le genre haha.

Dernière question : avec quels groupes rêverais-tu de tourner ? Je te laisse créer une tournée avec Anatomia et trois autres groupes !
Takashi : Hmmm… je n’arrive pas à en trouver seulement trois, il y a tellement de groupes… Avec de vieux groupes, probablement Autopsy, Derketa et Demilich… si je prends des groupes récents je dirais Spectral Voice + Blood Incantation, Undergang, et Fetid.

C’était ma dernière question, merci beaucoup de m’avoir accordé de votre temps et merci pour votre musique ! Pardonnez mon mauvais niveau en japonais : Domo arigato gozaimasu! Je vous laisse les mots de la fin !
Takashi : Merci pour cette interview ! Dou itashi mashite! Notre album arrive très bientôt, alors écoutez-le s’il vous plaît, et achetez-le ! Et nous sommes en train de travailler sur de nouvelles choses en ce moment, alors gardez un oeil sur ça également. Merci encore de nous avoir lus et pour votre soutien ! Stay dismal slow Death Metal!

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