Hellfest 2024 : Dimanche 30 juin

“Aujourd’hui, je la fais calme !”, me suis-je dis au réveil. Et vous finissez par me connaître, quand je déclare cela, c’est rarement bon signe… “Mais qu’importe la fatigue, c’est le dernier jour !”, me direz-vous… Et vous avez (à moitié) raison ! Je m’élance donc plein du peu de vie qu’il me reste à la conquête du quatrième et dernier jour du Hellfest 2024 !

Dernier tour en Valley pour cette année, car je n’entends que de bons retours sur Pencey Sloe, quatuor parisien évoluant dans des teintes Shoegaze. Le son est relativement brumeux, mais le soleil lui donne également un côté pesant, qui sera dissipé par la douceur de la voix de Diane Pellotieri (chant/guitare) qui met toute son âme dans ses paroles, malgré le peu de spectateurs matinaux. Les autres musiciens ne sont pas en reste, s’investissant totalement dans leurs riffs vaporeux, et je me promets de m’attarder sur le combo un peu plus tard cette année.

Je me rends sans transition sous l’Altar pour un moment avec les lorrains de Deficiency, où Thrash, Death et Groove se côtoient en secouant les cheveux. Sur scène, Laurent Gisonna (guitare/chant) et ses compères n’hésitent pas à jouer ensemble, changer de place et même se faire de petites feintes tout en assurant un son aussi précis qu’agressif qui séduit facilement. Le groupe se paiera même le luxe de nous apprendre l’une de ses chansons pour que l’on puisse scander le refrain en choeur, et c’est une réussite !

Je rejoins la Warzone au pas de course pour enfin assister à mon premier live de Sorcerer, et la première chose que j’y découvre, c’est que le vocaliste arbore le même t-shirt que moi, signe évident de qualité. Le dernier album des franciliens m’avait convaincu, et l’énergie du live aura le même effet : entre Hardcore, Post-Hardcore et autres éléments aussi mélancoliques que frappants, Dom Lucas (chant) et ses quatre camarades sont totalement investis dans chaque riff, chaque frappe et chaque cri. L’énergie du groupe est très largement communicative, et la fosse ne cesse de grossir alors que je dois déjà m’éclipser.

Setlist: Badlands – Only God Forgives – The Eternal Grief – The Burden Is Us – In the Arms of Mortality – Devotion – Ablaze – Someone Else’s Skin – Seed of Decline

On enchaîne avec la douceur de Sang Froid qui enchante déjà la Temple avec son Post-Punk froid mais intrigant, devant une assemblée de connaisseurs. Bien que plutôt habitué à sa voix saturée, T.C. (chant) nous propose une autre approche de son chant, soutenu par la rythmique accrocheuse et aérienne des musiciens qui se laisse facilement écouter, créant un contraste avec la chaleur montante de l’extérieur. Bien qu’assez peu friand du style, je reconnais que la performance a du charme.

Reprise des hostilités avec le Death/Thrash Mélodique de Destinity qui vient pour conquérir l’Altar avec une forme olympique avant l’heure du déjeuner, et ce n’est pas Mick Cesare (chant) qui me fera mentir tant l’homme est énergique ! A peine le sample introductif terminé, le groupe nous offre un son acéré et solide qui aura tôt fait de mettre la tente sans dessus dessous, attirant toujours plus de monde. Le vocaliste aura tôt fait de nous lâcher “Foutez une putain d’ambiance !” que le public s’exécute, et on voit déjà les premiers courageux s’envoler pendant que le reste de l’assemblée se rentre gaiement dedans au rythme des compositions des lyonnais, et la ferveur ne descendra pas d’un pouce jusqu’au final !

L’ambiance change radicalement avec la décadence de Pensées Nocturnes, qui n’a d’égal que la puissance vocale de Léon Harcore (chant), meneur de la troupe infernale. Chacun reste plus ou moins à sa place, mais le show était visiblement attendu par les amateurs de Black Metal, et ils sont déjà bien nombreux pour accueillir le spectacle. Il y avait un moment que je n’avais pas vu le groupe sur scène, et c’est bien dommage, car leurs shows sont toujours de qualité !

Setlist: Paria – Le Tango du vieuloniste – Deux bals dans la tête – Poil de Lune – Le Sidrogyne

Première (et dernière) Mainstage de la journée pour High on Fire, où la légende Matt Pike (guitare/chant) déverse déjà ses harmoniques sur le soleil Clisson. Entouré de ses deux camarades, le guitariste s’essaye au français avec un “Hellfest, ça va bien ?” auquel la foule entière lui répond, encourageant le trio à enchaîner leurs morceaux, car malgré leur statut, leur set est relativement court, et c’est avec un entrain non dissimulé qu’ils vont nous asséner leurs morceaux, notamment un Cometh the Storm (issu de l’album éponyme, sorti il y a quelques mois) groovy à souhaits !

Je commence à peine à souffler que l’opening de Pokémon retentit. Brand of Sacrifice s’apprête à prendre possession de la tente pour nous asséner ce qui sera l’une des plus grosses claques niveau Deathcore, et le groupe ne se fait pas prier pour nous envoyer des mospharts en continu, accompagnées d’un “Open this shit up!” de la part du vocaliste Kyle Anderson, désireux de voir le public les accompagner dans leur rage. Ni une, ni deux, c’est l’intégralité de la fosse qui explose et headbangue sans discontinuer, non pas pendant le premier morceau, mais pendant l’intégralité du show, ponctué de quelques interventions du frontman, qui nous incite à ne pas le décevoir et à mosher plus fort. Un grand moment de violence !

Après avoir souhaité son anniversaire à Pascal de Décibels-et-pixels.fr, revenons du côté sombre avec le show de Thron, qui démarre avec une froideur propre au Black Metal Old School, et qui va rapidement devenir plus brut et violent. Les musiciens restent principalement sur leur position, remuant parfois le crâne, mais c’est vers SAMCA (chant) que tous les regards se tournent : l’homme vocifère en se déplaçant, comme habité par une puissance impie et nous toise du regard comme s’il nous voulait morts. Il n’y aura pas de répit sur ce concert non plus, tant les racines du groupe nous fascinent, et les très rares interventions ne servent qu’à annoncer la future tempête qui frappe sans crier gare.

Une annulation de dernière minute entraîne souvent un remplacement, comme c’est le cas aujourd’hui pour Karras, qui prend la place de Caliban. Si les déçus sont nombreux, je suis tout de même satisfait de pouvoir à nouveau entendre les tronçonneuses vrombir dans le camp des parisiens, car je sais parfaitement qu’ils ne nous décevront pas. Les rares instant de répit que le trio nous autorise servent à Diego Janson (basse/chant) à nous inciter à suivre leur musique, et c’est très exactement ce que va faire le public. Pas de surprise, pas de quartier avec le Grindcore.

En me rendant sous la Temple, je savais que Yoth Iria allait jouer. Mais je ne m’attendais pas à une telle… surprise. Le groupe s’installe et commence à jouer, mais leur vocaliste, arborant un corpse paint, ne semble pas de cet avis, puisqu’il ira directement haranguer la fosse… sur les barrières, comme possédé par un démon liquide. Bien heureusement, un deuxième vocaliste surgit, encapuchonné, et prend le relais pour nous assurer un retour aux racines du Black Metal hellénique comme il doit l’être : glacial et impitoyable, avec tout de même des envolées mélancoliques, entrecoupées de courtes interventions qui permettent de tester la ferveur du public, notamment grâce à un “We are honored to be here!”. On notera que le premier vocaliste remontera tant bien que mal sur scène aider ses camarades, assurant des hurlements tout à fait corrects pour son état, ce qui me fait penser que le groupe ne peut qu’être incroyable si la sobriété est de mise !

On revient dans le Deathcore avec Shadow of Intent qui ne va pas mettre très longtemps à enflammer la fosse de l’Altar à coups de breaks pachydermiques. Ben Duerr (chant) ne se ménage pas avec des hurlements caverneux et des incitations incessantes, comme ce “It’s your time to go wild!” qui agira bien évidemment comme un détonateur sur les moshparts. Les slammeurs s’en donnent également à coeur joie, mettant à mal la sécurité que ce soit sur les parties les plus agressives ou les leads mélodieux du guitariste, ce qui semble plaire au groupe, très motivé à nous faire continuer tout au long de leur set.

Il y avait bien longtemps que je n’avais pas vu Wiegedood sur scène, et j’avais oublié à quel point le trio était efficace ! Glacial mais aussi précis que sombre, le groupe envoie immédiatement son mélange de Black Metal brut aux influences diverses, et nous engloutit dans sa noirceur en une fraction de seconde, tout en cultivant cette complémentarité malsaine entre la violence pure et une touche apaisante. On se sent comme ballotté dans une mer déchaînée, profitant tout de même parfois de la beauté des abysses avant que la tempête ne reprenne, et la sensation grisante ne s’arrêtera qu’une fois le show terminé.

Setlist: FN SCAR 16 – And in Old Salamano’s Room, the Dog Whimpered Softly – Until It Is Not – Ontzieling – De Doden Hebben Het Goed II – Noblesse Oblige Richesse Oblige – Nuages – Carousel

Il y a deux ans, Trevor Strnad nous quittait. Au delà de l’évidente tristesse de ce tragique évènement, personne ne savait ce qu’il allait advenir de son groupe, The Black Dahlia Murder. Mais le guitariste Brian Eschbach a décidé de faire vivre sa mémoire en reprenant le micro, et le moins que l’on puisse dire, c’est que c’est une réussite ! Entouré de ses camarades – dont l’ancien guitariste Ryan Knight – le nouveau hurleur se débrouille à merveille pour interpréter les morceaux de la formation, et c’est un véritable bonheur de voir les américains aller de l’avant ! Sans surprise, le nouveau titre Aftermath passe également très bien la barrière du live, et il est d’autant plus facile d’apprécier le concert quand on sait que l’album est en route ! Merci à vous cinq de maintenir cette flamme, et R.I.P. Trevor !

La Temple s’apprête à accueillir à nouveau le rituel de Batushka (le seul et unique, mené par Krzysztof “Derph” Drabikowski), et le groupe n’a pas hésité à profiter de la taille de la scène pour sortir tous ses accessoires. Bien qu’habitué au décorum du groupe, je suis toujours stupéfait de voir à quel point leur concert est millimétré et majestueux. Chaque volute d’encens, chaque son de cloche, chaque bougie et chaque mouvement est prémédité, ne laissant aucune chance au hasard. C’est toujours un bonheur de laisser les polonais nous emporter dans cet univers religieux singulier qui est le leur, et de vivre à leurs côtés chaque riff, chaque psaume et chaque accélération empreinte de Black Metal Atmosphérique.

AIs-je véritablement besoin de vous dire que Suffocation a tout déchiré sur l’Altar ? Je ne crois pas. Mais vu que c’est ma dixième fois avec les américains, vous m’y voyez obligés : c’est une véritable machine de guerre qu’absolument rien ne peut arrêter, et à laquelle tout le monde adhère de la première à la dernière note. Ricky Myers (chant) est tout simplement monstrueux, et même si le son est légèrement moins bon qu’en début de mois (où ils ont, pour rappel, joué dans la prestigieuse salle de la Gaïté Lyrique), on en prend plein les esgourdes ! Les musiciens se délectent du jeu de Terrance Hobbs, Charlie Errigo (guitares), Derek Boyer (basse) ou Eric Morotti (batterie), ceux qui ne le sont pas moshent à pleine puissance, et tous se rejoignent sur les breaks assassins que le groupe déploie avant de repartir dans la technicité la plus dévastatrice. On y reviendra avec grand plaisir !

Une légende s’avance sur la Temple ce soir, car la formation mythique du Gothic Metal suédois Tiamat est parmi nous. Si pour ma part je connaissais principalement de nom, n’ayant écouté en dilettante que quelques titres, je sais de source sûre que leurs fans de longue date sont nombreux, et rien qu’à voir leur entrée, le groupe entend bien nous ramener tous ensemble trente années en arrière. Il n’a pas fallu longtemps à Johan Edlund (chant) pour (re)conquérir le coeur de toute son assemblée, proposant un son enivrant d’une heure principalement basé sur les albums Clouds et Wildhoney avec trois morceaux chacun, mais qui n’hésite pas à revenir sur des morceaux légèrement plus récents issus de Prey et Judas Christ. Je ne suis peut-être pas le mieux placé pour parler de ce groupe, mais leur performance aérienne combinant chant rauque et envolées planantes, mais également quelques accélérations plus furieuses, m’a sans aucun doute emporté !

Setlist: In a Dream – A Caress of Stars – The Sleeping Beauty – Whatever That Hurts – The Ar – Divided – Cain – Vote for Love – Gaia

Quand on parle de légende, elles arrivent souvent à plusieurs, et ce sera à nouveau le cas ce soir car le dernier show de l’Altar sera marqué par I Am Morbid, et son chef d’orchestre David Vincent (basse/chant). Ceux qui l’ont connu à la tête de Morbid Angel savent que le bonhomme est aussi charismatique qu’imposant, et que lorsqu’il est bien en voix, le show ne peut qu’être excellent. Et c’est précisément ce qui se passe ce soir, car en plus de la setlist de rêve (l’enchaînement Blessed Are the Sick/Maze of Torment/Pain Divine m’a collé de sacrées courbatures) et du lineup de fou furieux (Pedro « Pete » Sandoval à la batterie, Bill Hudson et Richie Brown aux guitares), le son est incroyablement gras ! Chaque note frappe comme une claque en plein visage, les hurlements du sieur Vincent sont sauvages mais maîtrisés, et le groupe n’hésitera pas à haranguer une fosse totalement conquise, qui recrache aléatoirement quelques individus en cette heure tardive. Une véritable leçon de violence.

Setlist: Immortal Rites – Visions From the Dark Side – Blessed Are the Sick – Maze of Torment – Pain Divine – Dominate – God of Emptiness – Where the Slime Live

Quand je suis au Hellfest, j’aime finir mon dimanche avec une bonne note, mais ce ne sera pas véritablement le cas cette année, car si le sport national de la journée (course aux urnes mise à part) a été de se plaindre de la tête d’affiche, il a vite été remplacé par la ruée vers la Temple pour Dimmu Borgir… La quasi-intégralité des photographes était présente dans la file, et nous avons dû nous serrer plus que de raison pour tenter de décrocher des clichés potables avant de nous faire expulser sans pouvoir demander notre reste, pendant que les lumières infernales nous empêchaient de faire quoi que ce soit d’intéressant. Dommage pour le côté visuel, car le côté sonore était tout à fait appréciable, du moins de ce que j’ai entendu de loin, car la tente étant pleine à craquer, inutile de pouvoir profiter de l’optimisation des ingés son, ce qui est bien dommage car la setlist est incroyable. Je profiterai tout de même pleinement de The Chosen Legacy et Progenies of the Great Apocalypse en fredonnant les paroles, ce qui me fera perdre une quinzaine d’années l’espace de dix minutes.

Setlist: Raabjørn speiler draugheimens skodde – Spellbound (by the Devil) – The Insight and the Catharsis – Stormblåst – The Chosen Legacy – Council of Wolves and Snakes – Dimmu Borgir – Progenies of the Great Apocalypse – Mourning Palace

C’est fini. Le Hellfest 2024 ferme ses portes. Je n’ai pas à me plaindre, car là où de nombreux festivaliers s’exposent au blues post-festival, il me reste des milliers de photos à traiter (soyez indulgents, ça arrive !), des interviews à réécouter, mais surtout tous ces souvenirs avec les copains ! Merci à l’organisation, aux challengers, à la sécurité (bisous aux chargés des pits photo !), aux collègues médias et photographes, aux partenaires de discussions, qu’elles aient duré une poignée de secondes ou de longues minutes, à la restauration (c’est important), à la team Scénicdozer et à toutes les personnes que j’ai croisées ! On rempile l’an prochain ?

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