Day 3
Troisième jour de festival. Nous nous félicitons encore d’avoir pris une chambre d’hôtel plutôt que de séjourner au camping, mais le festival n’est pas fini pour autant. Il reste encore des groupes de tous horizons qui vont se succéder pour offrir au public des shows rares et de qualité.
La place de premier de la liste n’est jamais simple à assurer, et le duo américain Encoffination ne décrochera pas à la règle. Si Elektrokutioner (batterie) restera invisible pendant une bonne partie du show, ses frappes résonnent sur la Mainstage, alors que Ghoat (guitare/chant), immobile, joue des riffs lents sous des lumières très sombres. Quelques hurlements, des harmoniques lancinantes typiques du Doom Death, mais les musiciens restent silencieux malgré les applaudissements du peu de public présent pour cette ouverture, qui a donné une impression de vertige grâce à une fumée mesurée et un son pesant.
A peine le temps de rejoindre la petite scène qu’Holocausto Cannibal déverse déjà son Brutal Death sur Tilbourg. L’introduction est violente, et lorsque R. Orca (chant) déboule sur scène, le public entre petit à petit dans la fosse. Profitant d’une pause entre le deuxième et le troisième morceau, le frontman en profitera pour glisser quelques mots. “This one is dedicated to the fallens!” lâche le chanteur alors que des riffs teintés de Grindcore nous heurtent de plein fouet. Et pourtant… la fosse est assez peu réactive, notamment lorsque les musiciens demandent un circle pit qui sera composé d’une poignée de spectateurs visiblement plus motivés que les autres. Mais le blast est motivant, et les nuques se mettent en action, alors que les lumières puissantes nous laissent voir les musiciens sur scène. Et ce n’est que sur la fin que l’assemblée répondra réellement au groupe, qui n’a absolument pas démérité.
Nouveau show, nouvelle ambiance avec le Blackened Death Metal horrifique de l’introduction des belges de Possession. Totalement possédé (non ce n’est pas un jeu de mot), V. Viriakh (chant) se courbe sur scène, alors que les musiciens headbanguent sous des lumières rouges comme l’enfer. Et c’est d’ailleurs une impression d’oppression qui saisit le public, alors que les musiciens se démènent pour aligner riff après riff, qui seront malheureusement très mal mixés pour les premiers rangs. Et c’est peut-être ce qui vaudra cette immobilité dans la fosse, qui ne semble pas vraiment réagir à la motivation évidente du groupe. Un second chanteur, annoncé par le frontman, rejoint la formation, mais les hurlements incompréhensibles ne me permettent pas de le reconnaître, et c’est cependant un morceau très intéressant, avec deux types de hurlements, qui frappe Tilbourg en ce début d’après-midi, peu avant la fin du set de Possession.
Je rejoint une Second Stage pleine à craquer pour le début du set de Phlebotomised, visiblement très attendu. Car en effet, la formation s’est reformée il y a quelques années après une absence remarquée par leurs fidèles, et c’est au Netherlands Deathfest que le groupe fait son retour sur scène, après trois nouvelles années de silence, et le premier morceau est caractéristique de leur son. A la fois lourds et psychédéliques, les riffs des néerlandais transportent la foule, qui débute le concert par un titre vieux de vingt-cinq ans. Les claviers soulignent le caractère théâtral de Ben de Graaff (chant) qui lâche des hurlements imposants. Une demoiselle, visiblement en transe totale, headbangue comme si sa vie en dépendait alors que les musiciens, assez communicatifs, nous offrent un show très prometteur quand au futur du groupe.
Setlist : Devoted to God – Proclamation of a Terrified « Breed » – Barricade – Eyes on the Prize – Deformation of Humanity – Mustardgas – Descend to Deviance
Retour sur la Mainstage pour un show violent. Si l’introduction est plutôt calme, les musiciens sourient. “We are Revenge from Canada!” hurle Vermin (chant/guitare) avant que le son ne se transforme en brutalité pure et dure. Grimaçant en quasi-permanence, Haasiophis (basse/chant) joue des riffs qui semblent ne pas aller avec la guitare sous des frappes sales et millimétrées de J. Read (batterie). Pourtant, le mélange est cohérent, et la fosse est déjà en ébullition sur les morceaux de la formation qui, bien que statique, assure un son chaotique et très Raw. Les deux musiciens hurlent sur le devant de la scène, alors que le batteur est totalement invisible, et les solos tranchants sont éclairés de lumières blanches qui seront d’ailleurs les seules du concert. Le guitariste s’accordera quelques interventions, mais malheureusement pendant les morceaux, les micros semblent fonctionner en dilettante, ce qui ne dérangera pas les convaincus.
Retour rapide en Second Stage pour la toute première date européenne des japonais d’Intestine Baalism, que j’attends depuis littéralement dix ans. Et en tant que fan inconditionnel du groupe, je ne pouvais être plus comblé par la présence scénique du groupe qui, malgré une certaine immobilité, nous a donné à tous une véritable leçon de Death Mélodique. Seiji Kakuzaki et Kenji Nonaka (guitare/chant) se partagent les hurlements, tous plus viscéraux les uns que les autres, alors que Kenji Minagawa (basse) headbangue à chaque instant des riffs Old School et pourtant tellement savoureux du groupe. Hisao Hashimoto (batterie), que nous avions déjà vu la veille avec Butcher ABC, est toujours aussi en forme, et les rythmiques truffées d’harmoniques de la formation japonaise plaisent à la foule, qu’ils soient connaisseurs ou néophytes au son du groupe. Les japonais remercient les spectateurs entre les titres, puis enchaînent avec des titres qui parcourent les deux premiers albums des japonais avec une virtuosité impressionnante. Mais un petit souci technique nous rendra le solo inaudible, ce qui ne gâchera en rien la rythmique. Et après un titre supplémentaire, la formation quitte la scène, après un show impressionnant mais beaucoup trop court à mon humble avis.
Setlist : Corporal Celebration – A Curse of Baal – The Genuine Tone – Blasphemy Resurrected – A Place Their Gods Left Behind – Banquet in the Darkness – An Anatomy of the Beast
Retour en Mainstage pour le début du show des polonais. La recette employée par Mgla est simple mais efficace : cagoulés, les membres s’installent sur la scène et commencent à jouer avec un entrain palpable. Au centre, M (guitare/chant) fait hurler son instrument, accompagné de son chant rocailleux secondé par la voix de The Fall (basse/chant), qui joue souvent avec un pied sur son retour. Plus mesurés, E.V.T. (guitare) et Darkside (batterie) enchaînent des riffs avec une décontraction apparente, tels des ombres dans une lumière parfois aveuglante, qui sied à la perfection à l’univers sonore qui se développe devant l’assemblée. Entre ce son si noir et ce manège hypnotisant des silhouettes qui hochent la tête en jouant, la foule est conquise, et le mutisme apparent entre deux morceaux participe également à l’aspect mystique du concert, qui sera malgré tout quitté par de nombreux spectateurs. Pour ma part, Mgla m’a totalement happé, et je n’ai pas vu le temps passer.
On retourne sur du local avec le grand retour de Severe Torture sur les planches de la petite scène. “Hello guys, it’s good to be back!” lâche Dennis Schreurs (chant) en arrivant. “Do you want some Death Metal?” demande le chanteur comme pour lui-même avant que le premier morceau ne frappe la fosse, qui remue immédiatement sous les riffs gras et violents du combo néerlandais. Patrick Boleij (basse) se place en retrait pour headbanguer, alors que Thijs van Laarhoven et Marvin Vriesde (guitares) restent plus en avant, mais tous les musiciens headbanguent en continu. Un peu trop enthousiaste, un spectateur visiblement ivre tentera de retourner la fosse à lui tout seul, mais son entrain sera coupé net par un autre fan, qui appréciera moyennement de se prendre des coups dans le dos, et le concert continue. “This one is from our first album, it is dedicated to Seth van de Loo!” déclare Dennis avant de reprendre sur une rythmique mêlant technicité et puissance brute, qui lui permet d’arpenter la scène sous les frappes de Damiën Kerpentier (batterie), remplaçant de Seth. Et même après quelques années d’absence, Severe Torture n’a absolument pas perdu de sa fougue légendaire et de sa hargne qui se propage à travers toute l’assemblée pendant toute la durée de leur show.
Retour pour une nouvelle leçon de Death Metal à la suédoise pour le retour (décidément) de Vomitory sur scène. Et c’est un quatuor motivé qui prend d’assaut la Mainstage, et ils ont visiblement de l’énergie à revendre. Si Urban Gustafsson et Peter Östlund (guitares) heabanguent en permanence tout en jouant une rythmique très prenante, Erik Rundqvist (basse/chant) souffre de quelques problèmes au niveau du son de son micro. Heureusement, le problème sera rapidement réparé, et c’est un chant à pleine puissance dont nous pourrons profiter. « Good evening ! Vomitory from Sweden! » lance le frontman. « Are you having a good time? This next one is called Madness Prevails! ». Et c’est avec les frappes martiales de Tobias « Tobben » Gustafsson (batterie) que le morceau débute, dans la plus pure tradition du Death Metal au son sale du combo suédois. Haranguant la fosse à la moindre occasion, le chanteur s’assure un peu de mouvement au sein de l’assemblée, alors que les guitaristes headbanguent à l’unisson. Quelque peu changeantes, les lumières nous laissent parfois savourer quelques secondes de riffs dans l’obscurité, avant de revenir, mais le son reste toujours aussi bon.
Autre forme de violence, le Grindcore subtil de Viscera Infest. Enfin quand je dis subtil, c’est surtout car le chanteur nous fait parfois quelques petits bruits de cochon dans son micro avant le début des titres, car la délicatesse n’est pas vraiment le fort d’Eizo Asakura (guitare/chant) et sa bande ! Aidé de la basse d’Harufumi Nomiyama qui se balade sur scène armé de sa BC Rich ainsi que des frappes acharnées de Yuya Yakushiji (batterie), les japonais vont littéralement retourner la fosse ! « Highspeed! Highspeed! » hurle le frontman en accélérant la cadence à chaque fois. Et bizarrement, c’est après ce moment que les premiers slammeurs commenceront à monter sur scène pour effectuer la fameuse « danse du cafard », qui consiste à se mettre sur le dos, battre des pieds et des mains le plus vite possible, et retourner dans la fosse. Et le pire dans tout ça, c’est que le frontman harangue encore et toujours la fosse, avant d’introduire magistralement les morceaux. « Everybody sit down! » ordonne-t-il après une grosse demi-heure de show. Et une fois que l’intégralité de l’assemblée est assise (ou sur le dos, au choix), la violence reprend de plus belle, avec une fosse surexcitée. « That was the last one! » lâche le frontman avant de quitter précipitamment la scène en remerciant le public, suivi par les autres membres.
A nouveau l’ambiance va changer, car ce sont les vétérans d’Incantation qui montent sur la Mainstage du festival après un sample aux sonorités inquiétantes. Très charismatique, John McEntee (guitare/chant) observe la foule entre deux hurlements gutturaux avant de reculer pour headbanguer devant Kyle Severn (batterie), qui frappe violemment ses fûts, alternant un blast rapide avec une rythmique plus pesante. Le reste de la scène est parfaitement occupé par Chuck Sherwood (basse) et Sonny Lombardozzi (guitare), qui headbanguent sur les riffs les plus viscéraux du groupe. « We are Incantation and we are here to kick your fucking ass! » lance alors le frontman juste avant qu’un nouveau riff tout aussi puissant ne parte. Bien que fêtant ses trente années de carrière, le groupe reste toujours efficace en live, et ce son Old School aux accents Doom occulte fait plaisir à entendre.
Pas le temps de se reposer, Prostitute Disfigurement saute sur la Second Stage et envoie un Brutal Death de qualité dès les premiers instants. Sautant dans tous les sens et arpentant la scène en permanence, les hurlements de Niels Adams (chant) et la rythmique des musiciens déchaîne la foule. « Come on Tilburg! » hurle le frontman alors que Bob Sneijers et Alexander Przepiorka (guitares) enchaînent harmoniques et grosse rythmique, sous la double pédale fracassante de Dennis Thiele (batterie). Profitant de très rapides pauses entre deux morceaux, Patrick Oosterveen (basse) sourit à la foule avant d’abattre à nouveau ses doigts sur ses cordes, sous des lumières assez changeantes, qui font parfois passer les musiciens pour des ombres et nous aveugle la seconde suivante. « It’s not the end! » assure le chanteur qui voit déjà quelques spectateurs se diriger sur la scène suivante, avant de lancer un nouveau morceau. Toujours aussi réactive, la fosse leur rendra bien leur engouement jusqu’au dernier titre.
Le festival n’est pas encore fini, puisque c’est Deicide qui s’apprête à dévaster une dernière fois la scène principale. Déjà sur scène, les musiciens n’attendent que le coup d’envoi. « You all know this one… » annonce Glen Benton (basse/chant). Et c’est en effet l’incontournable Dead by Dawn qui démarre, sous des lumières rouges. Le groupe déchaîne les enfers jusqu’à ce que… Chris Canella (guitare) ne casse une de ses cordes. C’est donc à trois que Glen, Kevin Quirion (guitare) et Steve Asheim (batterie) termineront ce morceau emblématique, avant le retour de Chris. « He’s a new guy » plaisante le frontman avant que ne débute le second titre. Toujours aussi mauvaises, les lumières enveloppent les musiciens d’une aura rouge ou bleue, mais l’enchaînement des morceaux ferait headbanguer n’importe quel amateur de Death Metal. Petit bémol, le son de la batterie couvrira parfois quelques harmoniques des guitaristes, mais le jeu massif et brutal des américains force le respect. Annonçant rapidement certains titres, le groupe passera en revue une grosse partie de leur discographie, du premier album (dont trois titres seront joués) au dernier, qui passe parfaitement en live. Au cours du show, Glen parlera de moins en moins, mais assurera toujours avec efficacité un growl caverneux comme un scream rugueux, alors que quelques slammeurs s’aventurent dans la fosse, qui bout en permanence. Et c’est sur Kill the Christian que les américains finissent leur concert, qui ne fait qu’enfoncer des portes ouvertes : Deicide est un bulldozer qui écrase tout sur son passage.
Setlist : Dead by Dawn – When Satan Rules His World – Scars of the Crucifix – Crawled From the Shadows – They Are the Children of the Underworld – Once Upon the Cross – Defying the Sacred – Serpents of the Light – Seal the Tomb Below – Oblivious to Evil – Excommunicated – Dead but Dreaming – In the Minds of Evil – Sacrificial Suicide – Kill the Christian
C’est Naglfar qui a l’honneur de clore en beauté ce festival avec un Black Metal très mélodique aux riffs emplis de désespoir. Excellent frontman, Kristoffer W. Olivius (chant) apparaît en dernier et motive instantanément les premiers rangs, qui se mettent à headbanguer. Marcus E. Norman (basse) joue au plus près de la fosse, tendant parfois son instrument au dessus de la fosse, pendant qu’Andreas Nilsson (guitare) calque ses harmoniques déchirantes sur les frappes d’Efraim Juntunen (batterie). « I bet you are tired, this is day three, right? » ironise le chanteur. « You guys are true warriors ! Let’s move !». Et c’est un titre plus martial et rapide qui emplit la scène, alors que la foule ne réagit que peu aux incitations des musiciens. Rejoignant parfois le deuxième guitariste, Marcus harangue la fosse, mais seuls les premiers rangs lui répondent. L’écho dans le micro du chanteur donne une saveur particulière aux titres des suédois, et c’est en arpentant la scène que le frontman tente une dernière fois de déclencher des mouvements de foule. « Thank you to be here, this is the last one for us… but we will be back! » promet-il. Les cheveux et les barbes volent une dernière fois au rythme des riffs sombres du groupe, et ce sont des musiciens très souriants qui achèvent le dernier set du festival.
Setlist : The Darkest Road – Spoken Words of Venom – Bring Out Your Dead – Blades – Feeding Moloch – And the World Shall Be Your Grave – The Mirrors of My Soul – A Swarm of Plagues – The Brimstone Gate
Ereintés mais heureux, nous rentrons une dernière fois à l’hôtel. Pas un seul groupe ne m’a déçu, pas un seul musicien n’a démérité, et c’est avec tristesse que je me dis qu’à mon prochain lever, c’est Paris que je regagnerai. Du moins jusqu’à l’année prochaine…
L’organisation était parfaite, la programmation dantesque, et je remercie à nouveau l’équipe du Poppodium 013 pour m’avoir donné la chance de pouvoir immortaliser ces moments. Figés dans le temps, mais également gravés dans ma mémoire. A l’année prochaine, Netherlands Deathfest !