Interview : Inherits the Void

Pour la sortie de Monolith of Light, son premier album, j’ai pu discuter avec Antoine Scholtès, créateur du one-man band Inherits the Void.

Chronique de Monolith of Light

Bonjour Antoine, et tout d’abord merci de m’accorder de ton temps ! Comment présenterais-tu ton projet Inherits the Void sans utiliser les habituelles étiquettes Metal ?
Antoine Scholtès : Bonjour Matthieu et merci à toi de m’accorder cette interview ! A l’initiative de ce projet, en 2020, il y a eu une envie très personnelle. J’ai toujours été un grand fan de Black Metal. Je souhaitais donc m’orienter vers ce genre après avoir, plusieurs années durant, freiné cette envie car accaparé par le groupe dans lequel j’étais auparavant guitariste. En bref, j’ai souhaité avec Inherits The Void créer un exutoire à ma propre perception de nos sociétés actuelles. L’objectif étant d’allier rage et mélodies dans un coordination mutuelle. Avec ITV, j’ai voulu retranscrire mes craintes, mon dégoût mais aussi mes espoirs dans une musique qui se veut « extrême », à travers une approche mélancolique et froide des émotions. J’ai été bercé depuis mon adolescence par les groupes issus de la scène scandinave. Inherits The Void est donc un projet dans lequel je peux, à ma petite échelle, rendre hommage à ces compositeurs et au style au sens large du terme.

Pourquoi avoir choisi le nom de Inherits the Void? Quel est son lien avec ta musique ?
Antoine Scholtès : Le nom « Inherits The Void » est inspiré d’un ressenti très personnel de l’environnement sociétal et écologique dans lequel nous vivons. A travers lui, ressortent mes pensées les plus pessimistes voire misanthropique vis-à-vis du problème. L’Homme est un loup pour l’Homme comme dirait Hobbes. En effet, chaque jour nous sommes témoins d’actes d’intolérance, de rejet, d’autoritarisme et d’une certaine forme de désespoir humaniste et humanitaire en France comme ailleurs dans le monde. En outre, le contexte social et le désastre écologique actuels me laissent perplexe sur nos capacités réelles à évoluer dans la « bonne voie » malgré de nombreuses initiatives à l’œuvre ici et là. C’est de cette réflexion que l’idée du nom est née. Il s’agit également d’une thématique qui inspire et oriente ma musique. Cela dit, je garde l’espoir que des solutions positives puissent, un jour, émerger de ce chaos ambiant haha. 

Après un excellent premier EP nommé Mémoires en 2020, Monolith of Light, ton premier album, est sur le point de sortir. Comment te sens-tu ?
Antoine Scholtès : Merci pour tes mots concernant Mémoires. J’en profite pour te remercier pour la critique que tu en avais fait ! Pour être honnête je me sens à la fois excité et stressé. J’ai hâte de pouvoir partager cet album avec le publique et j’espère que les amateurs de Black Metal (et autres bien sûr) l’apprécieront. La sortie de Monolith Of Light est l’aboutissement d’un travail qui n’aurait pas été le même sans le soutien de mes proches et la collaboration entreprise avec Avantgarde Music. C’est donc également une chance est un honneur immense que de voir ce projet aboutir appuyé par la confiance d’un tel acteur.

Comment s’est passé le processus de composition de l’album ? Était-il différent de celui de Mémoires?
Antoine Scholtès : Le processus de composition est resté assez similaire avec ce que j’avais entrepris pour la réalisation de Mémoires. Toutefois, l’écriture de Monolith Of Light a été concomitante d’un bouleversement (positif !) dans ma vie. Celui-ci m’a donné une inspiration nouvelle et a été une force certaine à tous points de vue. Dès les premières notes de l’album, j’ai eu le souhait de faire évoluer ma musique comparativement à ce que j’avais proposé avec l’EP. J’ai voulu incorporer des influences plus variées. Ceci s’est fait en croisant différentes approches et visions du Black Metal ; entre « traditions » et « modernité ». J’espère que les gens y seront sensibles.

Y a t il un concept derrière cet album ? Que ce soit au niveau des paroles, de la pochette.
Antoine Scholtès : Le concept derrière l’album peut se résumer de la façon suivante : à l’échelle de l’Univers, l’Humanité n’est qu’un évènement dont la temporalité apparaît comme infiniment réduite. Paradoxalement, l’espèce humaine est un acteur majeur des désastres qui impactent le Monde dans lequel elle évolue. Je voulais m’exprimer sur ce caractère ubuesque au sein de l’album. Il s’agit là du fil rouge autour duquel gravitent les paroles. 

Quelles sont tes sources d’inspiration pour arriver à créer un univers musical aussi brut et glacial que majestueux et mélodieux ? Que ce soit des groupes que tu aimes, toute autre forme d’art, ou même autre chose.
Antoine Scholtès : Je te remercie pour cette description ! Cela me fait plaisir et me convient parfaitement ! L’album a été composé au cours de l’hiver 2020. Le « climat » hivernal et les paysages hivernaux sont ceux dans lesquels je me sens le mieux. Ce sont ceux qui m’inspirent le plus de choses et d’émotions. Cela a donc contribué, très probablement, à donner le caractère glacial que tu évoques. Aussi, mes principales inspirations sont issues de la scène scandinave, notamment la scène Black Metal des années 1990. Comme je le disais plus haut, en termes de mélodies, ils restent les maîtres mais c’est un point de vue très personnel. J’ai grandi en écoutant ces groupes, notamment Dissection, Vinterland, Dawn, Sacramentum, etc. Il s’agit d’influences très fortes qui resurgissent donc forcément lorsque je compose une chanson. 

Est-ce que tu accordes une importance à l’ordre des morceaux de l’album ?
Antoine Scholtès : Oui, l’ordre des morceaux est important selon moi. Réfléchir à cela permet de créer une histoire continue entre le début et la fin de l’album. La dynamique d’un album tient également de l’agencement des chansons les unes par rapport aux autres. C’est quelque chose d’important pour garder l’attention de l’auditeur. Il s’agit de ma perception de la chose. 

Monolith of Light sortira sur le label AvantgardeMusic, comment s’est passé la signature avec ce label ?
Antoine Scholtès : La signature avec Avantgarde Music a été une immense et agréable surprise. Au printemps dernier, j’avais entrepris de démarcher des labels afin de sortir l’album. Jamais je n’aurais pensé qu’Avantgarde puisse être intéressé. De nombreuses productions de ce label ont une place particulière dans ma discographie. La marque “Avantgarde est pour moi un gage de qualité en tant qu’aficionado de musiques extrêmes mais aussi d’idéaux. J’ai donc décidé de leur soumettre Monolith Of Light mais sans grand espoir d’avoir un retour pour être honnête. Je voulais ne pas regretter de ne pas l’avoir fait. Contre toute attente et très rapidement Roberto [Mammarella], le boss du label, m’a recontacté pour me faire part de son intérêt et de celui de l’équipe. Cela a été une sacrée surprise ! La collaboration avec Avantgarde a donc débuté de la sorte. Sortir Monolith Of Light sous l’étendard de ce label est un grand honneur. Je ne les remercierais jamais assez pour la confiance qu’ils m’ont octroyée.

As-tu déjà des objectifs pour après la sortie de l’album ?
Antoine Scholtès : Déjà, j’attends avec impatience les retours qui pourront être fait une fois Monolith Of light sorti. Même si je ne base pas mon orientation musicale ou mes idées sur les critiques, ces dernières restent intéressantes à prendre en considération, notamment pour avancer et progresser. La suite du programme pour ITV sera de retourner à la composition afin de donner une suite à ce premier album. De premières idées sont déjà écrites mais il s’agira de les embellir afin de proposer quelque chose d’encore différent par la suite. 

Qu’est-ce qui vous a poussé dans l’univers du Metal, et principalement du Black Metal ?Quel a été ton premier album de Metal ?
Antoine Scholtès : Je suis tombé dans l’univers Metal un peu par hasard. Petit, l’un de mes frères écoutait ce style. Un jour où je m’ennuyais, je me souviens avoir mis, par pure curiosité, l’une de ces tapes dans le lecteur. C’était l’album Slaughter Of The Soul d’At The Gates. Cela a été une révélation immédiate ! De là, tout a commencé. Cet album a été une porte d’entrée au style et très rapidement après, The Jester Race d’In Flames a été mon premier achat. Ma collection a débuté essentiellement avec des albums de scène Death Metal Mélodique suédoise (In Flames, Dark Tranquillity, etc.). A partir de là, la passerelle avec le Black Metal s’est faite rapidement, notamment avec des groupes musicalement à la frontière entre Death Metal Mélodique et Black Metal Mélodique tels que Dissection, Sacramentum, etc. S’en est suivi ma découverte du Black Metal via l’ensemble des groupes de la scène nordique.

Bien que ton projet ne soit actif que depuis 2020, quel est ton regard sur la scène Black Metal française ? Et la scène internationale ?
Antoine Scholtès : Je pèche peut-être par excès de chauvinisme mais selon moi, la scène BM française est de qualité. De surcroît, de nombreux groupes ont contribué à renouveler le style par incorporation d’éléments issus de styles musicaux plus ou moins éloignés. Je pense notamment à Regarde Les Hommes Tomber, Céleste, Déluge et bien d’autres encore. Et même dans une réalisation plus classique du style, de nombreux combos possèdent une excellente discographie et font rayonner le Black Metal français à l’internationale (The Great Old Ones, Aorlhac, Blut Aus Nord, etc.). Ces dernières années, de nombreuses claques musicales m’ont été données par des groupes français. Bien sûr, cet aspect n’est pas l’apanage de la scène hexagonale. En effet, des albums d’une grande qualité émergent chaque année un peu partout dans le monde. Sans pour autant ce renouveler entièrement et systématiquement – ce n’est pas forcément ce que je lui demande à titre personnel – le Black Metal est un style qui, selon moi, est en bonne santé et qui a encore de beaux jours devant lui. Le cas est d’autant plus vrai qu’une nouvelle génération de groupes émerge et porte avec elle des engagements forts. Ceci permet de contrer les stéréotypes, parfois, associés au style et de renouveler la vision du Black Metal.

Penses-tu recruter des musiciens, et peut-être même porter ton projet jusqu’à la scène, où préfères-tu rester sur un projet solo ? Pourquoi ?
Antoine Scholtès : Pour le moment, Inherits The Void est pensé et est souhaité comme un projet solo. Peut être que cela évoluera avec le temps mais il ne s’agit pas d’une volonté actuelle. Pour avoir joué dans un groupe par le passé, je sais à quel point le travail de groupe demande un investissement que je ne suis pas certain de pouvoir assumer actuellement. Le caractère « solo » d’ITV me permet d’avancer à mon rythme, sans me mettre de pression particulière. Je suis libre de travailler pour ITV lorsque j’ai un peu de temps à y consacrer, ma vie familiale (et professionnelle) étant ma priorité. 

Est-ce qu’il y a des groupes ou des musiciens avec lesquels tu aimerais collaborer, que ce soit pour un titre ou plus ?
Antoine Scholtès : Question difficile. Il y a en effet des musiciens que j’admire et avec lesquels je serai plus que ravi de travailler. Par exemple, Jonas Renkse de Katatonia ou encore Mikael Stanne de Dark Tranquillity pour n’en citer que deux. Mais soyons honnêtes, je pense que cela sera compliqué de parvenir à les avoir sur un titre d’une prochaine réalisation (haha). 

Quels sont les groupes de la scène française qu’il faut absolument écouter en 2021 selon toi ?
Antoine Scholtès : Il s’agit d’une perception très subjective mais parmi les sorties de 2021 Pierres Brûlées d’Aorlhac, Une Main de Remah, Hateful Triomph de Creeping Fear, Les Idées Blanches de Sordide ou encore A Sigh From Below de Venefixion ont été de très bonnes écoutes ! J’avoue avoir un peu (beaucoup même) de retard sur l’agenda de cette année et il y encore beaucoup de CDs que je n’ai pas écouté ni même appréhendé. Je vais tâcher de me mettre à jour !

Dernière question : dans l’optique où Inherits the Void jouerait en live un jour, avec quels groupes souhaiterais-tu tourner ? Je te laisse créer une tournée avec trois groupes, plus Inherits the Void en ouverture.
Antoine Scholtès : La tournée doit être réaliste ? Dans l’idéal je choisirai Dissection + Sacramentum + Vinterland mais le choix est compliqué et les groupes ne manquent pas. Dans un registre plus actuel, une tournée Regarde Les Hommes Tomber + Dödsrit + Ancst pourrait être très efficace.

Merci à nouveau de votre disponibilité, je vous laisse les mots de la fin
Antoine Scholtès : Encore une fois, merci à toi pour cette opportunité de parler d’Inherits The Void et de l’album. Et aussi, merci aux personnes qui soutiennent ITV depuis la parution de l’EP en 2020. Monolith Of Light s’apprête à sortir le 10 décembre prochain via Avantgarde Music et j’espère qu’il trouvera sa place dans la discographie des amateurs de Black Metal et de Metal au sens large du terme. 

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