Interview : Point Mort

Simon (batterie) et Damien (basse), section rythmique du groupe de Post-Hardcore francilien Point Mort, ont répondu à mes questions au sujet de la sortie de Pointless…, leur premier album.

Chronique de Pointless…

Bonjour et tout d’abord merci de m’accorder de votre temps ! Comment présenterais-tu le groupe Point Mort sans utiliser les habituelles étiquettes “Metal” ?
Simon (batterie) : Même en utilisant les “étiquettes habituelles”, on n’y arrive jamais ! Point Mort, c’est un groupe dont le seul but est de réaliser les fantasmes musicaux de membres aux influences très diverses. Une musique à base de grands écarts donc !! Même s’il faut être réaliste, ça reste du Metal !
Damien (basse) : Je dirais qu’on est 5 personnes aux parcours personnels et influences bien différentes jouant une musique tantôt haineuse tantôt accueillante.

Le nom du groupe était, selon vos réponses de 2019, lié à une stagnation dans la recherche du nom lors de répétitions en studio, en quoi trouvez-vous qu’il colle à votre personnalité musicale actuelle ?
Damien : Je pense qu’au final ce nom ne décrit pas du tout un immobilisme mais plutôt un tiraillement entre des forces extrêmes contraires aboutissant à une sorte d’équilibre imprévisible. 

Pointless…, votre premier album, sort bientôt, comment pourriez-vous le décrire en trois mots ?
Damien : Le mieux serait de le décrire par 3 petits points (…) (haha). Je dirai “maelstrom”, “profond”, “pointu”… Chacun y comprendra ce qu’il veut !

Comment s’est passé le processus de composition ? Qu’est-ce qui a changé depuis les premiers morceaux que vous avez écrits ?
Simon : On s’envoie généralement des maquettes de morceaux à un stade plus ou moins avancé, écrites soit en solo, soit en collaboration en “petits groupes”. Chacun est plus ou moins prolifique mais tout le monde est libre d’écrire de la musique pour le groupe. Rien n’est écrit ex-nihilo dans le local de répétition, on ne “jam” absolument jamais, ça ne nous correspond pas. Puis on joue les maquettes en l’état pour jauger le morceau en conditions réelles. Partant de là, on change les éléments qui ne font pas l’unanimité. C’est un processus où chacun à son mot à dire. C’est plus long mais théoriquement tout le monde est content du résultat final. Quand l’instrumental commence à vraiment nous plaire, Sam écrit ses paroles et ses lignes de chant.
Damien : Rien à rajouter à ce que dit Simon, il se peut qu’on passe beaucoup de temps sur des détails mais on arrive toujours à quelque chose qui nous plait à tous et qu’on assume.

Comment arrivez-vous à mêler toutes vos influences, qui sont tout de même très larges, tout en restant très cohérents ?
Simon : En essayant ! Si on a des doutes sur la pertinence d’un riff, on l’essaye quand même. Soit l’essai confirme les doutes, soit on trouve ça bien. A force de tester toutes nos idées, y compris les plus douteuses, on arrive à mettre sur pied des morceaux qui tiennent la route. Au final, dire d’un morceau ou d’un album qu’il est “cohérent”, reste, comme beaucoup de choses en musique, très subjectif.
Damien : On a pas de cadre ni de style préconçu, le résultat final de la chanson prime. Du moment qu’on aime ce qui sort des partitions et des répétitions, on avance dans cette direction.

Comment décidez-vous du type de chant à utiliser ? Même question pour les riffs clairs et saturés ?
Simon : Il n’y a pas de décisions conscientes sur ce genre de choix. Je veux dire que si par exemple on a du chant hurlé sur un riff et qu’on trouve que ça ne marche pas, on va essayer de changer soit le type de chant, soit le riff, soit l’accompagnement, la rythmique… jusqu’à trouver pourquoi le passage ne nous plait pas ! Ça se fait beaucoup par tâtonnement en fait.
Damien : Chaque ligne de chant est composée comme tous les autres instruments. Dans cet album il y a beaucoup plus de travail en studio sur les contrechants, c’était important pour nous tous qu’on aille plus loin sur ce point dans cet album par rapport aux EP précédents.

Comment s’est passée la conception de l’artwork de Pointless…?
Damien : Sam s’occupe des artworks du groupe. Même si on peut débattre entre nous de certaines propositions voire détails, elle fait tout de A à Z ! Le lien avec les paroles est totalement naturel car elle écrit également elle-même tout ce qu’elle chante.

Deux de vos morceaux font plus de dix minutes, comment avez-vous réussi à garder une cohérence dans vos influences aussi douces que chaotiques pendant autant de temps ?
Simon : Ce n’est pas un élément auquel on réfléchit pendant qu’on écrit un morceau. Si le morceau a besoin de faire 25 minutes pour être cohérent et nous plaire, alors il fera 25 minutes. De toute façon, on ne cherche pas à passer sur NRJ alors pourquoi se limiter ! La seule vraie limite c’est que le morceau puisse tenir sur une face de 33 tours. La complication c’est de faire tenir ces morceaux longs, qu’on a aussi envie de défendre, dans un set de concert sans sacrifier les autres morceaux.
Damien : Vu qu’on enregistre tous ensemble en studio (les 5 membres jouant dans la même pièce) je pense que aussi qu’on aurait pas été à l’aise avec des morceaux qu’on ne peut pas interpréter ensemble (soit par leur durée ou par des ambiances qu’on ne saurait pas reproduire). Ça c’est pour “Pointless…”, peut-être que le futur me contredira  ! En outre, pour que ça soit cohérent, on écoute beaucoup nos répètes, on réfléchit beaucoup et on travaille potentiellement chaque note pour qu’elle sonne le mieux. Parfois ça sort tout seul comme ça et c’est génial (pour nous du moins) tout de suite, parfois on en vient à remanier pendant longtemps un détail sur titre.

Depuis 2020, le monde souffre du Covid-19. Comment avez-vous vécu les différentes périodes de restrictions en tant que groupe ? Est-ce que la pandémie a eu un impact sur l’album ?
Simon : La pandémie a eu un gros impact sur l’album : elle nous a permis de l’écrire ! En temps normal, ça peut être assez dur d’être efficace dans la compo quand on doit régulièrement gérer la préparation et la répétition de sets de concerts. Le confinement puis les restrictions sont finalement tombés relativement au bon moment pour nous. Bien sûr, on regrette les dates qui ont dû être annulées, mais la plupart ont été reportées, tout est bien qui finit bien ! Cela dit, nous sommes conscients que beaucoup de salles et d’orgas de festivals ou de concerts ont été impactées beaucoup plus durement que nous !
Damien : Très pratique une pandémie pour bosser son instrument. Mais faut pas que ça dure très longtemps…

Le futur commence à devenir plus clair concernant les mesures gouvernementales, est-ce que vous avez déjà des plans pour le futur du groupe ?
Simon : Sûrement les mêmes plans que tous les autres groupes ! Écrire d’autres morceaux, qu’on mettra sur d’autres albums pour les jouer en concert, rien de très original en somme, mais c’est ce qu’on aime faire alors….
Damien : une tournée pour soutenir l’album plutôt à l’automne, des festivals cet été (le premier samedi du Hellfest notamment), et on commence à travailler en parallèle sur des nouveaux titres.

Quel est votre regard sur la scène française actuelle ? Et concernant la scène internationale ?
Simon : Personnellement je suis tout ça d’assez loin, je m’identifie assez mal au concept de scène. Ce n’est pas parce qu’un groupe joue la même musique que nous qu’on va forcément devenir potes ou qu’on ressent un sentiment d’appartenance à une communauté. Ceci étant, je pense qu’il y a de supers groupes absolument partout, et que la musique extrême aujourd’hui se porte vraiment bien en termes de créativité. Je trouve ça très cool qu’au sein d’une mouvance musicale qui existe depuis tant d’années, tant de groupes arrivent à sortir des albums hyper frais et qui apportent encore des trucs nouveaux ! La grande nouveauté de ces dernières années c’est que n’importe quel blaireau peut choper une carte son à 100 balles et sortir un album de merde sur internet, donc il y a plus de tri à faire pour l’auditeur, mais cette démocratisation des moyens de produire de la musique permet aussi à des artistes incroyables d’exister. La musique est à tout le monde !

Est-ce qu’il y a des groupes ou des musiciens avec lesquels vous aimeriez collaborer, que ce soit pour un titre ou plus ?
Simon : Je laisserai pour l’occasion ma place à Tomas Haake et je pense que ça devrait le faire pour les Grammys.

Quels sont les groupes de la scène française qu’il faut absolument écouter en 2022 selon vous ?
Simon : J’ai entendu dire que Valve devrait bientôt sortir un nouvel album…
Damien : On a joué récemment avec Untitled with Drums, j’ai beaucoup aimé. On peut aussi écouter Yarotz et Clegane par exemple ! Je ne cite pas Convulsif car ils sont suisses ! Zut c’est fait !

Quels sont vos hobbies en dehors de la musique ?
Simon : Je fais un peu d’électronique, surtout lié à la musique ou au spectacle. Je fabrique des pédales d’effets, des modules de synthés, des boitiers DMX, des choses comme ça…
Damien : La vidéo ! Je travaille sur les clips du groupe (avec Jessica qui gère aussi les photos de nous) et même si c’est très chronophage, c’est un autre mode d’expression annexe à la musique que j’ai toujours aimé. J’ai, de toute manière, toujours aimé ce qu’il y a “à côté” de la musique (artwork, lights, clips) je trouve que ça fait partie de la personnalité d’un groupe.

Qu’est-ce qui vous a poussé à créer un groupe ?
Simon : C’était pour la gloire et l’argent. Maintenant que c’est réglé, je ne sais pas trop quoi faire…
Damien : “Jouer” avec Simon. ça faisait plusieurs années que je le stalkais. Et connaissant son appétence pour l’argent et la gloire, je me suis dit que je pourrais me servir de lui pour arriver à mes fins.

Si je vous demandais à quel plat français pourriez-vous comparer la musique de Point Mort, lequel choisiriez-vous ? Pourquoi ?
Simon : Une fondue savoyarde mais avec 5 fromages hyper différents comme nous cinq ! Ça donnerait un plat un peu écœurant, mais plein de charme, je crois que ça nous correspond bien.
Damien : Je pense que 80% des discussions de Point Mort tournent autour de la bouffe (le reste je crois que ça parle vaguement de musique). Je pense donc que quelqu’un t’a informé de ce problème pour nous nuire car tu penses bien que cette question va forcément lancer des discussions sans faim ! euh sans fin !

Dernière question: avec quels groupes rêveriez-vous de tourner ? Je vous laisse créer une tournée avec trois groupes, plus Point Mort en ouverture.
Simon : Yob en tête d’affiche parce que c’est ce qui se fait de mieux en live, Goat, le groupe suédois au groove incroyable et Denzel Curry pour emmerder les metalleux !
Damien : Gojira et Converge, uniquement pour pouvoir bénéficier d’un pass “artiste” et les voir jouer sur le côté de la scène. Sinon, en général les artistes que j’aime bien sont morts !

Merci à nouveau de votre disponibilité, je vous laisse les mots de la fin !
Damien : Viendez aux concerts, j’ai l’impression que ça a du mal à redécoller ! Et un grand merci également.

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