Interview : So Hideous

Après la sortie de leur quatrième album, None but a Pure Heart Can Sing, j’ai eu le plaisir de discuter avec Brandon Cruz, guitariste et claviériste du groupe américain de Post-Black/Shoegaze So Hideous.

Chronique de None but a Pure Heart Can Sing

English version?

Bonjour et tout d’abord, merci de m’accorder de ton temps ! Pourrais-tu s’il te plaît vous présenter le groupe So Hideous et toi sans utiliser les étiquettes “Metal” habituelles ?
Brandon Cruz (guitare/claviers) : Nous sommes un groupe de Rock’n’Roll avec des orchestrations et un fantôme triste qui hurle.

Le nom du groupe était auparavant So Hideous, My Love… Est-ce que tu te souviens d’où il vient ? Pourquoi l’avoir finalement changé ?
Brandon : Il y a une dizaine d’année, en 2011 nous avons reçu une lettre de mise en demeure de l’entreprise cinématographique du documentaire sur lequel nous avions basé notre nom. Plutôt que d’aller en justice, nous l’avons raccourci.

Votre quatrième album, None but a Pure Heart Can Sing, est sorti à la fin de l’année dernière, comment le résumerais-tu en trois mots ?
Brandon : Ce qu’on veut.

Est-ce qu’il y a une histoire derrière cet album ? Comment le nom de l’album correspond avec votre musique ?
Brandon : L’album parle d’être complètement libre. Se séparer des voix du doute ou de la conscience de soi et suivre son instinct. Nous voulions chanter librement et ne pas faire attention à ce qui est considéré “cool” par les autres musiciens ou les auditeurs. Ca parle de faire revenir sa créativité à sa forme la plus simple, quand tu étais enfant et que tout ce qui importait était ce qui semblait bien à faire. Une situation un peu “danse comme si personne ne te regardait ».

Comment s’est passé le processus de composition ? Est-ce qu’il était différent des sorties précédentes ?
Brandon : Je pense qu’à la création le processus de composition était similaire aux précédents albums dans la mesure où ça démarre généralement avec moi au piano. Ce qui diffère c’est comment on a mis tout ça ensemble. Du temps où il n’y avait pas d’autres membres du groupe qu’Etienne et moi nous n’avions pas le luxe de faire des démos ou de jouer les titres en groupe complet comme lors des ères précédentes. Des centaines de démos iPhone/Garage Band/ProTools/Logic ont fait des allers-retours. Une fois que j’ai pris la décision d’enregistrer et concevoir de recruter Michael Kadnar nous étions déjà à pleine vitesse. Les “démos” ont pris forme et ses contributions couplées à celles de DJ Scully ont été le ciment qui ont tout lié ensemble.

J’ai été profondément émerveillé par votre saisissant mélange de sons bruts et d’orchestrations majestueuses à la base, puis par votre maîtrise de ces tonalités pesantes permanentes. Comment avez-vous fait en sorte de créer cette ambiance étouffante avec toutes vos influences ?
Brandon : Merci. J’ai toujours trouvé ça intéressant quand la communauté Metal se concentre autant sur les genres/influences. J’ai tout simplement enregistré ce que j’ai pensé bon et que j’aime jouer. Je ne m’assieds pas au piano en me disant “je pense que cette partie a besoin d’un soupçon de Hardcore supplémentaire, un poil plus Screamo mais ajoutons du Black Metal pour décorer tout ça”. C’est une recette de cuisine, pas une expression créative libre. Les préoccupations de genre et de “comment nous nous identifions” semblent tellement stupides. Nous jouons ce que nous aimons jouer et ce dans quoi nous pouvons placer notre ressenti.

Sur cet album, il y a des musiciens invités au violon, alto, violoncelle, saxophone, trombone et trompette. Pourquoi avoir choisi de demander à de vrais musiciens de jouer au lieu d’utiliser des samples et logiciels ?
Brandon : C’est comme demander à quelqu’un pourquoi il irait au Grand Canyon alors qu’il peut simplement en regarder une vidéo sur YouTube. Pour moi, les choses réelles sont toujours meilleures et si tu as la chance d’avoir le temps et les ressources de le faire, alors pourquoi s’en priver ? J’ai toujours aimé travailler avec des musiciens en dehors du groupe, et je suis reconnaissant de leur contribution à notre bruit.

Le morceau le plus impressionnant selon moi est Motorik Visage, sur lequel je ressens une bataille constante entre les deux aspects de votre musique. Que signifie ce titre pour vous ?
Brandon : J’ai eu l’idée de pousser le concept un peu plus loin tout en regardant quand même dans le rétroviseur. Réconcilier son passé et son avenir. En dépit de sa longueur et des nombreux mouvements, je le considère comme l’un des titres les plus conservateurs au niveau du son car il ressemble sur beaucoup de points au son de “l’ancien So Hideous” quoiqu’un peu sous stéroïdes et en résolution 4K HD. C’était l’un des plus difficiles à enregistrer… Quand nous l’avons terminé, il y a eu un grand sentiment d’accomplissement dans le studio.

Depuis 2020, le Covid-19 a foutu pas mal de choses en l’air, comment avez-vous fait face à la situation en tant que groupe ? Est-ce que la crise a eu un impact sur l’album en lui-même ?
Brandon : Je pense que la situation du Covid a aidé l’album car nous n’avions pas à nous soucier des concerts, des réseaux sociaux ou des autres choses associées au fait d’être un groupe actif. Nous pouvions simplement travailler et enregistrer sous le couvert de la nuit, tout en étant libre d’avoir quiconque à qui répondre sans réelle échéance. Je pense que c’était bénéfique pour nous, et ça nous a permis de prendre les meilleures décisions à la fois pour nous et pour l’album.

Est-ce que vous avez déjà des plans pour le futur du groupe ?
Brandon : Nous ne serons probablement plus jamais un groupe qui tourne, mais nous recherchons assurément des dates ou des courtes séries de concerts qui feraient sens à nos yeux. C’est en préparation actuellement. Nous avons également un ou deux titres qui ne rentraient pas dans les tonalités de None But A Pure Heart Can Sing que nous aimons et que nous cherchons à enregistrer, possiblement en tant que singles dans les prochains mois. C’est ouvert, et nous aimons ça.

Qu’est-ce que tu aimes dans ta musique que tu ne retrouves pas dans la musique d’autres groupes ?
Brandon : Notre ouverture d’esprit. Je pense pas avoir entendu de l’afrobeat, du saxophone, un quartet de cordes, du chant hurlé et du blast beat dans beaucoup de titres d’autres groupes en même temps. Je suis content que nous fassions ce que nous avons envie de faire, et on continuera de le faire aussi longtemps qu’on en aura envie, et autant que ça marchera.

Le groupe est actif depuis 2008, est-ce que tu as remarqué une évolution de la scène Metal ? Que ce soit dans ton pays ou même à l’international.
Brandon : Je n’en ai pas vu. Il semble quand même que les gens au lycée cherche de la crédibilité dans une mentalité de troupeau. La pression des pairs et le facteur “cool” semble dicter ce que les gens aiment. Dans tous les cas, nous continuons d’avancer tranquillement et de faire notre truc parce que nous aimons notre musique.

Je ressens beaucoup de rage et d’émotions dans les parties de chant. Est-ce que c’est simple de communiquer autant d’émotions ?
Brandon : Je ne pense pas que ce soit “simple” pour Christopher de chanter de cette manière et nous apprécions toujours qu’il mette son corps et ses capacités à profit pour exprimer les sentiments extrêmes et accablants dans notre musique.

Quelle est ta meilleure et ta pire expérience en tant que musicien ?
Brandon : Ma meilleure expérience a été d’enregistrer le grand ensemble de cordes pour Laurestine, c’était le plus proche que nous ayons d’une production cinématographique, et je savoure ce jour et cet album. Ma pire expérience a probablement été de subir du racisme en tournée.

Est-ce que tu as déjà entendu parler de la scène Metal française ? Quels groupes français connais-tu ?
Brandon : Je n’en connais pas beaucoup, mais Celeste est toujours l’un des quelques groupes de Metal que j’aime écouter, peu importe ce que j’écoute d’autre. Ils ont toujours un son puissant et bien pensé concernant les concepts de leurs sorties.

Si je te demandais de comparer la musique de So Hideous avec un plat ? Lequel choisirais-tu et pourquoi ?
Brandon : On serait probablement des lasagnes, car il y a plus de couches que tu penses lorsque tu creuses.

Est-ce qu’il y a des musiciens ou des groupes avec lesquels tu souhaiterais collaborer ?
Brandon : Lana Del Rey a toujours été un de mes buts depuis de nombreuses années maintenant. Un jour peut-être.

Dernière question : avec quels groupes aimerais-tu tourner ? Je te laisse créer une tournée avec So Hideous en ouverture, et trois autres groupes !
Brandon : Le tiercé japonais : Heaven In Her Arms, Envy, MONO, ce serait un rêve.

C’était ma dernière question, merci à nouveau de m’avoir accordé de ton temps, et pour ta musique. Je te laisse les mots de la fin !
Brandon : Merci pour l’interview. J’aimerais remercier les auditeurs et les lecteurs pour leur soutien. C’est quelque chose qui compte énormément pour nous après une pause de cinq ans. Nous espérons continuer à faire de la musique et nous apprécions que vous soyez là pour ça. Merci.

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